jnUSÊES VOTIOX DES flIkTS DÉCORPTIFS ET IRDDSTRIELS Palais ela Ciae^aaiiteïiaiííe = A BRUXELLES = La Dcirtelle GUIDE DU VISITEUR Eug. VAN^OVERLOOP CONSERVATEUR EN CHEF PRIX : 50 CENTIMES i BRUXELLES IMPRIMERIE DREESEN & DE SMET, RUE DES URSULINES, 37 T ffSÍES BOrHDX DES RDTS DÉCOERriFS ET IDDD8TRIEL8 Palais du Cir)c(uaï7teí7aijpe == A La JDef)tellc GUIDE DU VISITEUR PAR Eug. VAN OVERLOOP CONSERVATEUR EN CHEF i Monogramme des Archiducs Albert et Isabelle. Détail du couvre-pied en dentelle de Bruxelles. 1599. AVANT-PROPOS La création, dans nos Musées, d'un compar- timent de la dentelle, est due à l'initiative de M'"® Montefiore Levi. Cette généreuse bienfaitrice s'occupa de réunir, à notre intention, un ensemble important de dentelles, qu'elle nous offrit et qui constitua le premier fonds de notre collection (1). Nous lui devons donc, un hommage tout spécial, et il a paru que la meilleure façon de le lui rendre était d'attacher son.souvenir à l'ensemble de la section, dont le local a reçu, dans cette pensée, le nom de salle Montefiore. La collection s'est accrue, depuis, de nombreux dons, que nous aurons soin de rappeler, en leur temps, pour ce qui concerne les pièces les plus importantes. (1) Les dentelles faisant partie du fonds Mo'ntefiore sont numé- rotées en rouge. A côté de ces dernières, nous avons reçu, en grand nombre, des spécimens de dentelles, plus modestes, sans doute, mais qui nous ont permis de jeter les bases d'une collection documentaire, appelée, pensons-nous, à rendre de réels services. Nous adressons ici nos vifs remercîments aux personnes qui nous ont aidé .de la sorte et dont les noms se trouvent consignés dans la liste qui figure à la fin du présent Guide. Enfin, nous nous faisons un devoir d'exprimer notre gratitude envers M""® Kefer-Mali, qui, depuis plusieurs années, nous seconde de ses qualités d'artiste, et de ses connaissances techniques, dans les arrangements de nos vitrines. C'est à elle que revient notamment le mérite d'avoir entremêlé les pièces de notre collection de ces instructifs portraits « à dentelles », si unanime- ment appréciés et que notre précieuse collabora- trice nous a gracieusement offerts. DIVISION GENERALE La Section de la dentelle se partage en trois compartiments, montrant successivement : 1° Les industries connexes, ayant, dans une certaine mesure, préparé les voies à la dentelle; 2" Les dentelles à la main (aiguille et fuseaux), de fabrication belge ; 3° Les dentelles à la main, d'origine étran- gère. Un quatrième compartiment, en préparation, comprendra les « dentelles » exécutées autrement qu'à l'aiguille et aux fuseaux, les dentelles au crochet, par exemple, ainsi que les produits d'imitation ou dentelles mécaniques. INDUSTRIES CONNEXES Certaines industries, plus anciennes que la dentelle, ont donné naissance à des produits ajourés, susceptibles de réaliser déjà, dans la toilette et dans l'ameublement, les effets de trans- parence et de légèreté que la dentelle porta si 1 haut. Leur technique possède, d'autre part, divers points en commun avec la technique dentellière. Ces industries ont donc vraiment, pouvons-nous dire, tracé les voies à la dentelle. Leurs produits se partagent en deux groupes : les travaux de broderie, précurseurs du point à l'aiguille et les travaux de passementerie, d'où sont sorties les dentelles aux fuseaux. Travaux de Broderie. N'ayant à considérer dans la broderie que la devancière de la dentelle, nous nous bornerons à parler des broderies les plus voisines de cette dernière : les broderies blanches et ajourées. Celles-ci comprennent : le filet brodé, la broderie à fils tirés, le lacis et le point coupé. Filet brode. — Ce genre de travail comporte nécessairement deux phases : la confection du filet lui-même, s'efiPectuant à l'aide d'un moule et d'une aiguille à filocher ; puis, l'œuvre de broderie proprement dite, consistant à recouvrir le filet de dessins variés, exécutés au point de reprise. Les contours de ces derniers sont nécessaire- ment influencés par la disposition rectangulaire des mailles qu'ils sont obligés de suivre. Il en résulte un aspect raide et anguleux, peu favo- rabie, notamment à la représentation des figures. Le filet brodé jouit d'une grande faveur au Moyen-âge et à l'époque de la Renaissance, non seulement pour l'ameublement, mais encore pour le costume. On lui donnait aussi le nom de réseau ou,réseuil. Souvent, les morceaux de filet brodé étaient incrustés dans de la toile, soit unie, soit brodée. La mode en est revenue de nos jours, du moins en ce qui concerne l'ameublement. L'intérêt archéologique, que présentent nos spécimens anciens, se trouve ainsi doublé d'un regain d'actualité. 1. Grande vitrine verticale. Filet brodé, travail italien de l'époque de la Renaissance. Belle corn- position, rinceaux élégants, peuplés de figures d'hommes et d'animaux ; vers le centre, à droite^ l'inscription Tigris, reproduite vers la gauche, en contrepartie. Dans les angles, des portraits accompagnés d'initiales. Dans la bordure, une armoirie reproduite plusieurs fois. [Collection Montefiore.) 2. Sur l'autre face de la vitrine : Un panneau, à trois compartiments, avec figures d'animaux (licorne, aigle et cigogne, cerf fuyant), travail français, de la fin du XVP siècle ; A gauche de ce morceau, un fragment de filet coupé. Dans cette variante, assez rare, du travail de filet, on mettait à profit la consolidation résultant du travail de broderie, pour éliminer, à l'aide de ciseaux, une partie du filet primitif ; Annonciation, en style italien, portant la date 1628; Fragment d'une autre Annonciation, en style flamand, du XVIP siècle ; [Collection Montefiore.) Dans le haut, composition religieuse, travail hongrois, paraissant moins ancien. 3 et 4. Vis-à-vis de la vitrine précédente, deux cadres 3 et 4. renferment des filets brodés, encadrés de bandes de toile, ornées de point coupé. La plupart de ces objets sont du XVIP siècle. Ils se signalent par une grande variété dans les dessins. Deux d'entre eux portent une bordure de filet brodé, — 8 — en forme de dents. L'usage de ces bords « den- tellés », comme on les appelait jadis, est anté- rieur à l'apparition de la dentelle ; celle-ci les adopta, à son tour, et finit par en garder le nom. (Collection Monteflore. ) 5. Paroi verticale. Longues bandes, sur lesquelles des carrés de filet alternent avec de la toile brodée, que décorent, en outre, des motifs étoilés, au point à l'aiguille, d'une grande variété et d'une exécution très fine. Les dessins en sont em- pruntés, pour une , partie du moins, au célèbre livre de modèles, publié, vers la fin du seizième siècle, par l'italien Vinciolo, que Catherine de Médicis avait fait venir à la cour de France. (Legs de Biefve.) L'on a réuni, dans la partie inférieure de cette vitrine, une série de filets de couleur, espagnols, italiens et flamands, du XVIP siècle, dépendant de la collection Montefiore, ainsi qu'un choix de filets brodés persans, très anciens et devenus fort rares, rapportés de Téhéran et offerts au Musée par M™® Naus. Sur la paroi verticale de la vitrine suivante, fragments de courtines, où se trouvent retracées des scènes de l'histoire de la Compagnie de Jésus. Ces pièces présentent un enchevêtrement de filet brodé, de point coupé et d'une sorte d'ouvrage en étoile, semi dentelle, semi macramé (travail à noeuds).Elles proviennent de l'église Saint-Charles (anciennement église des Jésuites), à Anvers, où il en subsiste encore d'autres fragments, servant aujourd'hui de nappes de communion, [Collection Montefiore.) Dans la partie inférieure de la vitrine, d'autres filets brodés, d'origines diverses, appartenant, pour la plupart, au XVII® siècle et dont l'un, représentant les attributs de la Passion, porte la date 1612. [Collection Montefiore.) Broderie à fils tirés. — Cet ouvrage délicat consiste <à retirer, par endroits, de la toile des fils de chaîne et de trame, dans la proportion des « clairs » qu'on désire obtenir; puis à recouvrir d'un travail de broderie les parties du tissu éclaircies de la sorte. Parfois, au lieu de retirer les fils, on se borne à les partager en minces faisceaux, serrés à l'aiguille et écartés les uns des autres par le fait même de ce serrement. On traite les "jours » qui 6. en résultent tout comme les « jours w provenant des fils tirés. C'est la broderie à fils écartés. Un procédé, plus sommaire encore, consiste à semer de petits jours la broderie sur toile en la trouant simplement au moyen d'une grosse - - aiguille. Mais il va sans dire qu'il n'en résulte 10 qu'un aj ou rage très relatif. C'est le cas pour diverses pièces de la collection, notamment pour le gilet Louis XVI et pour la petite camisole d'enfant, exposés dans la vitrine n° 89. (Collection Montefiore.) Mais revenons au fil tiré proprement dit. Souvent, les fils étaient tirés dans les deux sens, avec une régularité qui transformait les élé- ments restants en une sorte de canevas, sur lequel d'étroites réserves de toile dessinaient un décor ou une inscription. Dans ce cas, les fils formant treillis étaient, avant qu'on les recouvrît de broderie, presque toujours renforcés et fixés par un enroulement qui leur donnait une grande solidité. On en usa de la sorte, principalement, aux époques anciennes. 7. La vitrine n° 7 nous en montre un exemple curieux. C'est une pièce formée de trois lais de grosse toile, reliés entre eux par un pas- sement de fil. Les deux lais de côté sont tra- versés de bandes de fil tiré, vraiment typiques pour ce genre de travail. La partie centrale pré- sente, entre deux champs de fil tiré, brodés de losanges, un Christ en croix, de caractère plutôt barbare, entouré des attributs de la Passion. Au pied de la croix, deux anges d'un style maniéré; au-dessus des bras, deux petites figures, parais- sant porter jupon, le poing sur la hanche, et jouant de l'éventail. Ces détails, joints d'ailleurs à la lourdeur générale de l'œuvre et à l'âpreté de la figure du Christ, nous font regarder ce travail comme étant espagnol. On le croirait du XVP siè- de, n'étaient les anges au pied de la croix, qui décèlent le siècle suivant. Cet objet intéressant nous a été donné par M™® Peltzer de Clermont. La même vitrine renferme de bons morceaux de fil tiré, du genre de travail dit « en réserve », offerts également par M""® Peltzer de Clermont. Les uns, rapportés de Normandie, paraissent dater de la fin du XVP siècle; l'autre, le grand morceau, représente un travail italien, que sufd- rait à désigner comme tel le mot Libertà, qui s'y trouve constamment reproduit. Ces diverses pièces sont remarquables par la netteté avec laquelle les réserves de toile, formant dessin, s'y 7. Dans les temps plus rapprochés de nous, le travail se fit plus délicat et plus menu. La ville de Dinant acquit, au XVIIP siècle, une véritable renommée pour ce genre d'ouvrages, qui continua d'y être pratiqué pendant la première moitié du - — XIX® siècle. 12 La partie inférieure de la vitrine n"* 7 en ren- ferme divers spécimens, parmi lesquels un beau bas.d'aube, avec manches assorties. 8. La Lorraine est encore le pays des fines brode- ries. On y a travaillé principalement au plumetis, tandis qu'en Belgique domine plutôt le principe du « stoppage ». Nous croyons devoir attribuer à cette région le fichu portant le n° 241 qui se trouve déposé dans la vitrine n° 8. Sbis. Le caractère lorrain ne fait pas de doute pour ce qui concerne la délicate manche à trois étages, dite « engageante », exposée à l'entrée, dans la petite vitrine n° S^is. Cette manche, malheureu- sement dépareillée aujourd'hui, fut brodée pour une maîtresse de Louis XV, dans un couvent de Nancy. Une circonstance imprévue ayant fait obstacle à sa livraison, on la mit en loterie parmi les pensionnaires de la maison et le sort la fit 8bis. échoir à une jeune fille, de qui elle passa, par tradition successive, à Eugène Devaux, femme du distingué portraitiste que l'on sait. M. Eugène Devaux vient d'ofirir au Musée, en souvenir de M™® Devaux, ce précieux morceau, jauni par le ~ ~ temps, mais qui n'en a que plus de crédit 15 pour nous conter^ à la fois, l'habileté des brodeuses d'antan et le degré de raffinement auquel les dames du XVIIP siècle poussaient leurs exigences de toilette. Le porte-bébé, de la deuxième moitié du XVIII® siècle, exposé dans la même vitrine, nous présente un très heureux assemblage de Valenciennes et de délicates broderies, dans lesquelles intervient également le genre « à fils tirés . Ce charmant objet nous a été offert par Madame Peltzer de Clermont. 8. Les broderies de Saxe, si réputées, ont large- ment utilisé le principe du fil tiré. Cette technique y fut développée au point de donner parfois au tissul'aspect d'une vraie dentelle. Aussi, désignait- on souvent ces ouvrages sous le nom de « dentelles de Dresde ». Mais d'autres pays en produisaient également et l'on trouvera, dans les deux vitrines dont nous parlons en ce moment, plusieurs mor- ceaux de fil tiré, susceptibles de jouer le rôle de 8. dentelles véritables. Tels, par exemple, le volant (n° 326) exposé dans la partie supérieure de la vitrine n° 8, le bas d'aube et le joli rabat Louis XV déposés dans la partie inférieure de la même vitrine. — 14 — 9. Lacis. — Ce terme a donné naissance à bien des discussions. Nous n'aborderons pas ces der- nières, nous bornant à dire qu'à notre avis, l'ouvrage de treillis, formant la base du lacis, s'obtenait de deux façons : 1° Par la voie négative, en retirant régulière- ment des fils dans les deux sens et en les immo- bilisant, comme dans le fil tiré ; 2° Par la voie positive ou directe-, en entrela- çant sur un chassis, à l'écartement voulu, des fils se coupant à angle droit. L'entrelacement simple, résultant de cette opération, ne donnant pas assez de fixité, on accrut cette dernière en doublant le fil de trame d'un deuxième fil, disposé en contre- partie du premier. Le fil de chaîne se trouvait ainsi pincé entre deux, et il en résultait une stabilité sufiisante pour permettre au travail de broderie de s'exécuter par dessus. Toute la vitrine n° 9 est garnie de lacis, exécuté suivant ce deuxième mode. Les ouvrages dont nous venons de parler, filet, fil tiré et lacis étaient compris autrefois sous la dénomination générale d'ouvrages à mailles. Ceux-ci étaient déjà conçus dans l'esprit de la dentelle et remplissaient l'office que cette dernière occupa plus tard. Néanmoins, ils se distinguaient nettement des dentelles à l'aiguille en ce que, à la différence de celles-ci^ leur exécution nécessi- tait toujours la préexistence d'un tissu, toile ou réseau, qui leur servait de base. Point coupé. — Tel fut aussi le caractère de la broderie dite " de point coupé », du moins au début. Mais nous allons voir qu'en ce qui concerne ce genre d'ouvrages, les choses n'en restèrent pas là et que cette broderie se fit dentelle, sans presque que l'on s'en doutât. La broderie de point coupé tirait son nom de ce que, pour ménager dans la toile les jours qu'on voulait recouvrir de broderie, on ne se borna plus à retirer simplement un certain nombre de fils, et qu'on coupa carrément la toile, avec des ciseaux, dans la mesure désirée. Le bord de l'ouverture, préalablement assuré au point de boutonnière, devenait le point d'attache de croisillons de fil, ou de diagonales, qu'on lançait par dessus l'espace vide, et Ton formait ainsi une sorte de charpente, 10. ou de bâti, aux branches duquel la broderie pou- vait, dès lors, accrocher ses fantaisies les plus menues. Lorsque le jour à ménager était fort étendu, au lieu de le découper d'une haleine, on laissait sub- — 16 — sister, par places, quelques fils de chaîne et de trame, qu'on transformait, par un travail à l'ai- guille, en cordonnets, dessinant, par dessus le vide, une sorte de fenestrage, formé de carrés réguliers. Ces cordonnets servaient, en quelque sorte, de relais à la broderie qui voyageait par dessus et lui conservaient, en même temps, une assiette aussi stable que celle de la toile même dont ils faisaient partie intégrante. Cette méthode permettait d'étendre les jours indéfiniment, fut-ce sur toute l'étendue de la toile, transformée, de la sorte, en ouvrage complètement ajouré. L'aspect rétiforme qu'imprimait à cette broderie le qua- drillé des cordonnets de base, lui fit donner le nom de reticella. Nous signalerons parmi nos objets de point coupé, dans la vitrine n" 10 : Une belle taie d'oreiller, décorée d'une riche broderie à fils tirés, avec des médaillons de reti- cella d'une grande délicatesse. C'est un travail français de la deuxième moitié du XVI® siècle; Plusieurs bandes de lingerie^, décorées de dessins élégants, avec jours de point coupé : travail italien, également du XVP siècle ; Un corporal bordé de reticella ; Des bandes de lingerie destinées à entourer les rouleaux de la Loi et portant des inscriptions en hébreu; [Collection Montefiore.) Enfin, parmi les objets modernes, une longue pièce de lingerie provenant des Abruzzes et une chemise de paysanne calabraise, donnée par Mme jgp 3tappen. Le point coupé pouvait en demeurer là, sans réclamer de nouveaux progrès techniques, tant qu'il trouva moyen de s'appuyer sur un enca- drement de toile. C'était le cas pour les entre- deux, pour les rectangles de broderie encadrés de tissu, en un mot, pour toutes les broderies à bords droits, appelées à faire corps avec la pièce principale. Mais il n'en fut plus de même lorsque, pénétrant dans le domaine de la passementerie, le point coupé voulut jouer le rôle de bordure d'ajouté et spécialement de bordure dentelée. Il ne pouvait évidemment en arriver là qu'en créant, de toutes pièces, cette fois, et à l'état libre, le bâti que ne pouvait plus soutenir aucune toile envi- ronnante. C'est ce qu'il fit. L'invention du point à l'ai- 2 guille ne fut pas autre chose que la substitution d'un bâti libre au bâti précédemment appuyé sur un entourage de tissu ; et il est assez vraisem- blable que la raison déterminante de cette inven- tion fut la nécessité de procéder de la sorte dans — 18 — les bordures dentelées, que la technique du point coupé devait porter à une si haute perfection. Le travail nouveau conserva, pour le surplus, l'allure et le caractère du travail précédent ; on lui maintint même, par habitude, le nom de point coupé, qu'il garda pendant un siècle encore, tant que subsista, dans le point à l'aiguille, le style ancien, dit géométrique. Travaux de Passementerie. La genèse de la dentelle aux fuseaux apparaît, à première vue, d'une façon moins nette. On ne peut douter cependant que la passementerie ait 4, été son point de départ. La passementerie fut jadis un art très en faveur. Elle donna naissance à mille inventions char- mantes, que nous ont transmises les portraits anciens ef dans lesquelles l'élégance et l'ingénio- sité le disputent à la richesse des matières pre- mières mises en oeuvre. Nous nous en tiendrons, quant à nous, au seul genre de passementerie qui intéresse direc- tement notre sujet, à savoir les galons et bor- dures. Nous ne parlerons même pas de tous les galons. Ceux-ci se partagent, en eifet, en galons — 19 — tissés ou travaillés au métier et en galons exécu- tés aux fuseaux. Ces derniers, les seuls qui doivent retenir notre attention, portaient spécialement le nom de passements. Le passement était donc, à proprement parler^ une bordure, ou un galon, exécuté aux fuseaux, soit sur un carreau, quand il fallait user d'épin- gles, soit sur le boisseau (1), dans les autres cas. Répondant aux goûts fastueux de l'époque, les passements furent d'abord faits de fils d'or, d'ar- gent ou de soie. On leur appliqua, d'autre part, une forme, depuis longtemps en vogue pour les bordures des vêtements, la forme dentelée (2) et l'on créa, de la sorte, des passements dentelés ou dentellés, c'est- à-dire faits en forme de dents. (1) Boisseau, portion d'un cylindre de bois naince, creux, coupé par la moitié et sur lequel les fuseaux sont placés, leur tête tour- née vers l'ouvrier, V. Savary, Diet, du commerce. (2) On commença par découper, en forme de dents, l'étoffe même dont était fait le vêtement. Puis, on trouva plus pratique de remplacer ces découpures par une ajoute de passementerie, qui avait l'avantage, d'autre part, d'ajouter à la toilette un accent de plus grande richesse. Toutes les dentelles d'or et d'argent qui se sont faites depuis lors, ne sont pas autre chose. Elles n'ont, du reste, jamais quitté le domaine de la passementerie qui leur donna naissance et c'est encore dans la classe des passementeries que nous — 20 — les voyons figurer aux Expositions. Qu'est donc de plus la dentelle proprement dite? Quel est l'élément nouveau qui lui valut de constituer un produit si nettement à part? Une chose bien simple : la substitution du fil de lin aux fils formés précédemment de matières plus riches. C'était une faible trouvaille, en apparence ; mais, en réalité, ce fut une révolution telle que la dépendance de la passementerie s'en trouva secouée et qu'il en surgit une industrie nouvelle, évoluant de sa vie propre et marchant à des destinées sans précédent en ce genre. Un principe domina ces dernières : l'esprit de lingerie, dont les premiers souffles, venus de l'Orient, par les croisades, avaient gagné toute l'Europe, introduisant dans le costume une note de légèreté, de fraîcheur, de netteté et d'hygié- nique confort, qui formait comme l'antithèse des riches tissus, épais et hermétiques, se lavant mal ou pas du tout, dont on s'était accommodé jusque là. Le XVT siècle qualifia la dentelle de « fleur de lingerie « et c'est sous ce jour-là qu'il faut l'envisager si l'on ne veut méconnaître la force vivifiante qui lui donna son caractère et sa vitalité. Le lin, substance modeste, presque vile, tenait heureusement de quoi racheter, aux yeux du — 21 — monde, son origine plébéienne. L'extrême divisi- bilité de ses fibres permettait d'en tirer un fil d'une ténuité telle que sa valeur au poids attei- gnit la valeur du fil d'or. C'était assez pour que la mode accordât ses faveurs à l'humble lin, devenu précieux à ce point. Mais ce ne fut pas tout. Pour utiliser cette finesse et la mettre en valeur, la technique des fuseaux fut conduite à modifier complètement son allure d'autrefois. Privée de l'éclat facile des matières premières, réduite à son mérite propre, elle dut désormais porter toutes ses forces sur la beauté et la finesse de l'exécution. Le souci de pousser toujours plus avant dans ce sens, tint les fuseaux en alerte constante et l'on vit, de cette manière, une vie souple et variée se substituer aux façons d'être, monotones et figées des passe- ments d'autrefois. En même temps, conséquence tout aussi impor- tante de l'introduction du fil de lin, la confection du passement qui, pour les matières d'or et d'argent, constituait essentiellement un métier p T d'homme, comme il n'a cessé, du reste, de le demeurer, la confection du passement de lin devint essentiellement un métier de femme. Ce fut, peut-on dire, la dentelle de lin qui créa la dentel- lière et l'on sait à quel point cette féminisation du métier influença, à son tour, le tempérament des produits qui allaient en sortir. En résumé, la dentelle ne fut donc pas, à vrai dire, une invention. La seule innovation technique consista dans l'application d'une mé- thode plus' souple et plus délicate à la mise en oeuvre des procédés anciens. La raison d'être de cette innovation fut l'introduction formelle du lin dans l'industrie du passement. Ce fut le lin qui flt franchir à la dentelle le seuil de ses destinées nouvelles. Mais, s'il j réussit aussi complètement, c'est que sur ce seuil l'attendait la main de la femme, seule capable de conduire et d'élever la dentelle aux délicatesses qui devaient faire son mérite et sa gloire. Telle est la façon simple et naturelle dont a pris naissance la dentelle aux fuseaux. 11, Nous rencontrerons plus loin, dans les dentelles de Flandre, des passements dentelés ou picots, qui reproduisent assez exactement ce que furent les premières dentelles de lin. Mais nous avons m T 11- cru devoir, en outre, réunir ici, dans la vitrine n° 11, quelques passementeries anciennes, de tout genre, à seule fin de rappeler le rôle joué par la passementerie dans la genèse de la dentelle aux fuseaux et de l'opposer à la broderie, dont le point à l'aiguille procéda de son côté. Signalons, parmi les plus intéressantes, la jolie dentelle d'or, donnée par M""® Bollati, de Rome, ainsi que la série de dentelles, d'or également, qu'a bien voulu nous prêter M"® Paul Errera. Nous avons également accueilli dans les indu- stries connexes deux autres genres de produits ayant avec la dentelle de grandes affinités : ce sont les blondes et les tulles brodés. 12. Blondes. — Les dentelles de soie sont généra- lement connues sous le nom de Blondes. Cette dénomination leur vient de ce que les premières dentelles de ce genre furent faites d'une soie écrue, dont la teinte justifiait parfaitement l'appel- lation en question. On y employa, plus tard, des soies de couleur, principalement des soies noires ; mais le travail demeura, pour le surplus, tout pareil au précédent et, aux yeux de celui qui devait les exécuter, ces divers genres n'offraient guère de différence entre eux. C'est pourquoi les É — 24 — . -i 12. gens de métier les confondirent sous un même nom et pourquoi, malgré leur contraste, les den- telles de soie noire se sont appelées des blondes, tout comme les dentelles couleur des blés. On a fabriqué des dentelles de soie en de nom- breux endroits. Ce serait nous écarter de notre sujet que d'entrer là dessus dans de plus grands détails. Qu'il nous suffise de dire que, dans notre pays,le principal centre de cette production, assez délaissée de nos jours, fut la ville de Grammont. Les spécimens exposés ici se rapportent, pour la plupart, à la période de 1820 à 1840. Ils sont intéressants par leur forme, autant que par leurs caractères techniques. Nous remercions tout particulièrement M""® Delehaye, Julie Hayez, M®® Kefer Mali, Minet et M""® Edgar de Prelle de la Nieppe, qui eurent la bonté de nous les offrir. 13 et 14. Tulles brodés. — Les tulles brodés «jouent » t la dentelle et se substituent, en réalité, à celle-ci à un tel point que nous devions nécessairement les comprendre dans nos industries connexes. La broderie sur tulle s'exécute soit à l'aiguille, soit au crochet. La broderie à l'aiguille est travaillée notam- ment dans le pays de Waes, où elle concourt. ÜÉ i; 14. avec le point de Lille, à produire les curieux bonnets, dont le port s'est heureusement conservé dans les diverses provinces de la Hollande. La maison E. van Migem, d'Anvers, est le principal représentant de cette industrie, que J.-J. — 25 — Collier, de Lille, ancêtre direct des chefs actuels i de la maison, vint fonder dans le pays, il y a plus d'un siècle. M. E. van Migem a bien voulu, à notre demande, réunir et nous offrir généreu- sement une collection des divers bonnets bollan- dais dans lesquels interviennent les produits de sa fabrication. Cette collection, qu'accompagne la présentation, dans des cadres spéciaux, des types de broderies et de dentelles qui entrent dans la confection de ces bonnets, cette collection, disons- nous, est d'un grand intérêt. M. van Migem nous a emprunté, pour la durée de l'Exposition de 1910, les bonnets mêmes, qui sont, en ce moment, exposés au Solbosch ; mais I les cadres documentaires sont demeurés ici : ils se trouvent exposés sur le palier d'entrée. Le deuxième centre de la broderie sur tulle est la ville de Lierre. On y brodait autrefois et on y brode encore à l'aiguille ; mais ce genre d'ouvrage a été complètement détrôné par le travail du crochet. r Des coupons de tulle brodé, exposés dans la 2 13 et 14. vitrine n^ 13 et dont la fabrication se place vers 1850, ont tout à fait l'allure des petits volants de dentelle ou de blonde qu'on employait dans la toilette, en ce temps-là. Nous les devons à l'obli- geance de M™® Préherbu, de Delehaye, de — 26 — M"® Minet et de M™® Kefer Mali. Nous signalerons, pour l'époque du premier Empire et de la Restauration, deux voiles, d'un dessin riche et élégant, qui nous ont été offerts, l'un par M. Montefiore-Levi, l'autre par M""® Paul De Mot. La vitrine n® 14 renferme de très beaux volants, plus anciens encore, dépendant du fonds Monte- fiore. Ces morceaux ne sont pas seulement remar- quables par le dessin ; le travail y est, de plus, poussé au point qu'aucune partie du fond de tulle ne subsiste à l'état primitif : partout où ne régnent pas les points de broderie, le tulle se trouve doublé, de manière à former des parties mates d'un très heureux effet. 15. M.Lavalette,fabricant de dentelles,à Bruxelles, nous a fait don du grand rideau, dit « mystère » qui occupe le cadre n® 15. Cette pièce, d'un beau dessin, a été exécutée en 1880. 16. Les cadres suivants renferment une intéres- santé série de types de broderies sur tulle que nous a gracieusement offerte M""® Skellekens-I)e Pauw, de Lierre, une véritable artiste, ainsi qu'en témoignent les nombreux dessins dont elle est l'auteur. Nous exposons, à l'extrémité de cette rangée de cadres, deux pièces de la collection Montefiore qui n'avaient pu trouver place dans les vitrines précé- dentes : Un voile du XVIP siècle, en broderie à fils tirés; Et un manteau, très délicatement brodé de soie, avec entre-deux et dentelle assortis. L'analyse des divers genres d'ouvrages, dont nous venons de nous occuper, fera saisir plus fa- cilement la définition suivante de la dentelle. La dentelle proprement dite est un agencement de fils de lin, d'un caractère décoratif, exécuté à l'aiguille ou aux fuseaux, indépendamment de tout tissu lui servant de support. Telle fut, du moins, la dentelle dans son exprès- sion première et pure, et à ses jours les plus glorieux. Plus tard, principalement à partir du XIX® siècle, le coton a pris rang dans la confection de la dentelle et il tend, de plus en plus, à évincer le fil de lin, qui régnait seul pré- cédemment. Après avoir considéré, comme nous l'avons fait, la façon dont prirent naissance le point à l'aiguille et la dentelle aux fuseaux, on peut se demander lequel de ces deux genres a précédé l'autre, quel pays les a vu naître et, finalement, — 28 — quelle date il convient d'assigner à leurs pre- mières manifestations. Ces divers points ont fait l'objet de vives dis- eussions, au cours desquelles le chauvinisme des parties intéressées a mis en ligne des arguments de toute espèce. Leur solution ne présente pas un intérêt pra- tique sufiisant pour que nous nous y arrêtions longtemps. Une chose paraît certaine, c'est que la dentelle est apparue lentement, par voie d'évo- lution. Ses débuts furent des plus modestes, si bien qu'aucun auteur ne semble avoir pris la peine d'en consigner, en termes exprès, l'avène- ment. Les portraits de l'époque, quelques indica- tions tirées des vieux livres de modèles, les notes fournies par d'anciens inventaires, telles sont, en cette matière, nos seules sources d'information. Et encore, ces observations sont-elles bien su- jettes à caution. Les inventaires commandent, en effet, la plus grande prudence, étant donné que beaucoup de termes, qui, dans notre langage actuel, visent de la vraie dentelle, étaient employés anciennement dans un sens très différent : tels le mot dentelle lui-même et ses homologues allemand et italien : Spitzen et merletti; tels encore les, mots punto, — — lace, guipure, 29 passement, etc., directement em- pruntés à la broderie ou à la passementerie. Quant aux éléments d'appréciation tirés des livres de modèles du XVP siècle, ils sont confus et contradictoires. De plus, la façon dont les édi- teurs se pillaient leurs planches, de pays à pays, rend suspectes les conclusions qu'on en pourrait tirer concernant le pays d'origine des modèles que ces planches représentent. C'est, en définitive, dans les portraits et dans les tableaux que résident les témoignages les plus précis et les plus authentiques. On a retrouvé dans certains tableaux du XV® siècle, au bord des objets de lingerie, de petits agréments (bâtonnets, arcatures minus- cules, etc.) manifestement faits de lin, se profilant en dehors de la toile et rentrant par conséquent dans la définition de la dentelle. Ce seraient, si l'on veut, des rudiments de dentelle et le D^' Dre- ger, de Vienne, qui s'en est occupé spécialement, les appelle les « dentelles du XV® siècle. Mais cet auteur admet, tout le premier, que ce ne sont \ — 30 — pas encore là de vraies dentelles. Les premiers ouvrages dignes de ce nom apparaissent, vers l'an 1535, sur les portraits, tant d'hommes que de femmes, bordant la lingerie du col, ainsi que les manchettes. Ce sont, à tous égards, de véri- tables dentelles, puisque non seulement ils répon- dent à la définition ci-dessus, mais qu'ils repro- duisent, en outre, le profil dentelé d'où les dentelles ont définitivement tiré leur nom. En général, et pour autant que la peinture permette d'en juger, ces premières dentelles paraissent être faites à l'aiguille et leurs dessins préludent aux délicates constructions géomé- triques que devait achever de mettre à la mode l'Italien Vinciolo. Est-ce à dire que le point à l'aiguille ait devancé la dentelle aux fuseaux et que la dentelle, dans son ensemble, eut l'Italie pour berceau? Non, sans doute. Le point à l'aiguille ayant été, de tout temps, la dentelle d'apparat, nous devons nous attendre à le rencontrer sur les por- traits, de préférence à la dentelle aux fuseaux, qui se portait davantage dans la vie ordinaire. La rareté de la dentelle aux fuseaux, dans les portraits du XVI® siècle, ne témoigne pas plus contre son existence que ne témoigne contre l'existence des coiffures à barbes du XVIP et du XVIIP siècles, l'extrême difficulté de retrouver un portrait sur lequel ces coiffures soient repré- sentées. Un seul point nous paraît établi : c'est que la — 51 — dentelle, tant à l'aiguille qu'aux fuseaux, date du moment où l'on se mit à exécuter, en fil de lin, les bords dentelés dont il fut de mode de garnir les collerettes et les manchettes. Ce fut le cas, nous l'avons dit, pour le point coupé, que ce profil dentelé força de rompre avec la technique, à base de toile, de la reticella ; ce fut le cas également pour la dentelle aux fuseaux, comme en témoigne matériellement le nom même qu'on lui donna. La mode de ces bords dentelés, nous l'avons dit, n'était point nouvelle. La passementerie les utilisait depuis longtemps. Il paraîtrait, dès lors, assez vraisemblable, que les passements aux fuseaux, pour qui la création des dentelles de lin n'offrait aucune difficulté technique, aient de- vaneé, dans leur production, le point coupé, pour qui la confection des mêmes dentelles néces- sitait, au contraire, l'invention de procédés entiè- rement nouveaux. Mais, vaines discussions que tout cela. Aiguille et fuseaux se sont suivis d'assez près pour que — Ô-2 — LOUS ne soyons pas tellement intéressés à décou- vrir qui des deux marcha devant. Quant à l'autre point, celui de savoir en quel pays la dentelle prit naissance, un fait indé- niable domine tout ce qu'on en pourrait dire. L'Italie n'a cessé, jusqu'au XVIIP siècle, d'être, par excellence, le pays du point à l'aiguille, tandis que les Pays-Bas demeuraient la terre bénie de la dentelle aux fuseaux. Nous en concluons, quant à nous, que chacun de ces pays eut vraisembla- blement le mérite d'avoir donné naissance à la branche spéciale d'industrie qui s'}' montre si bien " chez elle ». Que l'Italie garde donc l'aiguille et la Belgique les fuseaux. DENTELLES BELGES Nous venons de dire que la Belgique est, avant tout, le pays de la dentelle aux fuseaux. Le point à l'aiguille y fut sans doute pratiqué, lui aussi; mais on peut affirmer, d'une façon géné- raie, qu'en dehors de Bruxelles, sa fabrication n'apparaît dans notre pays qu'à titre accidentel. Nous en reparlerons en son temps. Les débuts de la dentelle, en Belgique, II demeurent obscurs. On doit croire cependant qu'elle y fit son apparition vers le deuxième tiers du XVP siècle. La fabrication de la dentelle, pratiquée dans différents centres, ne se diversifia pas de suite au point de déterminer des genres locaux, dési- gnés par le nom de leurs localités respectives. Les productions de celles-ci se perdaient encore dans une technique générale commune et l'étranger les confondait, à son tour, sous l'unique appellation de dentelles de Flandres (1). Ce serait pourtant une erreur de croire que, dès le principe, les influences locales n'aient pas mis quelque peu leur empreinte sur les — produits 34 ^ issus de ces centres divers. L'action des milieux, âme de toute évolution, ne connaît point de répit et la dentelle ne put manquer d'éprouver son influence dès les premiers temps. Seulement, on ne prit pas garde, tout d'abord, à ces accents locaux, assez faibles encore et l'on attendit, pour en tenir compte, qu'ils eussent pris la valeur plus accusée que consacra définitivement la différen- dation des fonds de réseau. Nous croyons pouvoir, en ce qui concerne les dentelles aux fuseaux, ramener les genres locaux à quatre grandes familles, qui serviront de base à notre classification. Ces familles sont : 1° Les dentelles de Bruxelles, auxquelles nous rattachons les dentelles dites « de Brabant » ; 2° Les dentelles de Flandre; (1) Dans le Brabant et dans la Flandre on désignait les ouvrages en question " sous les noms de leant „ bordure et de " spelle- werk travail aux épingles. 3° Les dentelles de Malines et leurs congé- nères de la province d'Anvers; 4° Les dentelles de Valenciennes et leurs proches parentes, les dentelles de Binche. — 35 — Dentelles de Bruxelles. Il est logique de penser qu'on produisit de la dentelle à Bruxelles plus tôt que dans toute autre ville du pays. Bruxelles, résidence habi- tuelle de la Cour, était la ville de la mode et des élégances et le mot d'ordre dut venir de là, d'au- tant plus que la dentelle fut le résultat, non pas d'une invention subite, susceptible de se produire n'importe où, mais d'une action progressive dont la capitale était certainement le centre. Nous n'avons recueilli là dessus aucune indi- cation précise antérieure à 1550 ; mais nous connaissons des textes formels prouvant que l'industrie de la dentelle était en pleine activité à Bruxelles, dès la deuxième moitié du XVP siècle, et qu'on y employait déjà les enfants. On distingue, dans les dentelles de Bruxelles, les dentelles à fond de brides, dans lesquelles les fleurs et, en général, les éléments du décor sont soutenus et reliés entre eux par des barrettes, hérissées d'ordinaire de tout petits picots ; et les dentelles à fond de réseau, dans lesquelles ces mêmes éléments décoratifs se projettent sur un fond de petites mailles, de forme variable, juxta- posées régulièrement comme les mailles d'un filet. — 36 — Enfin, lorsque lés éléments du décor se touchent directement, sans interposition de brides ni de réseau, ne laissant par conséquent entre eux que les interstices résultant de l'inégalité de leurs contours, on donne aux dentelles le nom de guipures. Les dentelles les plus anciennes furent des guipures, terme, soit dit en passant, emprunté à l'industrie voisine de la passementerie. Puis, ce fut le tour des dentelles à brides, dont l'apogée correspond à la deuxième moitié du XVIP siècle. Finalement, dans le dernier quart de ce même siècle, nous voyons apparaître les dentelles à fond de réseau, dont le règne occupe le XVIIP siècle tout entier. Nous retrouverons plus loin, sous le nom de dentelles de Flandres, les anciennes guipures, qui se firent partout dans le pays flamand. Mais 17. nous revendiquons spécialement pour Bruxelles une guipure historiée, par laquelle va s'ouvrir notre énumération et qui constitue l'une des pièces capitales delà collection. Nous voulons parler du couvre-pied exposé dans le cadre n° 17. Il résulte d'une étude détaillée, dont cette pièce a fait l'objet récemment, que le couvre-pied en question, entièrement exécuté aux fuseaux, aurait été olfert aux archiducs Albert et Isabelle, à l'occasion de leur inauguration, à Bruxelles, en qualité de ducs de Brabant, l'an 1599. On y trouve représentés les nouveaux souve- rains, qu'achève de désigner leur monogramme, reproduit deux fois; puis le roi Philippe II et d'autres personnages princiers; les armoiries de Brabant, d'Espagne et d'Angleterre, les lys de France, l'aigle d'Autriche, et enfin, tout autour de ces motifs de circonstance, de nombreux sujets empruntés au célèbre cortège de l'Omme- gang du Sablón. La figure légendaire de sainte Gudule, qu'on remarque vers le milieu de la pièce, complète, d'une façon très heureuse, la physionomie bruxelloise de ce document. La bordure est formée des figures d'un certain nombre d'empereurs romains et des sibylles, images fort à la mode, au XVP siècle, dans les Pays-Bas. La technique dentellière dont Bruxelles s'est fait une spécialité, se dessine déjà dans ce mor- 17. ceau par deux traits bien caractéristiques, à savoir la prédilection pour les représentations de figures d'hommes et d'animaux et, d'autre part, les eifets de relief, qu'on rencontre principale- ment dans la représentation des accessoires. Ces reliefs constituent parfois de véritables appen- — 38 — dices, exécutés aux fuseaux, comme le reste. Tels sont, par exemple, le rayón qui, dans le n° 46, s'échappe de l'ostensoir ou le soufflet du diable, dans l'image de sainte Gudule; ou bien encore, les collerettes dans les divers portraits, les rames dans la représentation du navire, le sceptre de la figure n° 47 et, d'une façon géné- raie, les doigts des personnages, les nœuds des vêtements, etc. Les inégalités manifestes que nous montre l'exécution de cette dentelle annoncent la colla- boration de plusieurs ouvrières. Ces inégalités apparaissent surtout dans les sujets reproduits deux fois et susceptibles, dès lors, d'être con- frontés directement. Si l'on compare, par exem- pie, dans les n°® 34 et 38, les représentations de l'homme agenouillé aux pieds du roi, on demeure frappé de la distance qui les sépare : d'une part, un vrai dessin d'enfant, gauche, presque gro- tesque, d'autre part, une figure bien com- prise, convenablement dessinée et d'une certaine 17. noblesse. On peut en conclure que les modèles livrés aux ouvrières laissaient à celles-ci quelque liberté d'interprétation. La dentellière j mettait du sien et ce qu'elle pouvait avoir de sens artis- tique trouvait ainsi moyen de s'affirmer. [Collection Montefioi'c.) - 59 — 18. Des dentelles à brides du XVID siècle occupent la vitrine n° 18. C'est d'abord un volant, formé de deux demi bas d'aube, à fond de brides picotées, dont les rin- ceaux, très embrouillés, sont traversés par d'étroits cordonnets, décrivant des nœuds et des entrelacs et encadrant de petits « jours », où se dessinent déjà certains points qu'adopta définiti- vement la dentelle de Brabant. La même technique se retrouve dans le frag- ment de haut volant, placé au dessus ; mais ici les rinceaux font place à des ordonnances élan- cées, que dénomme assez justement le terme de « candeliere », dont on les a baptisées. Les picots, ou bords inférieurs dentelés de ces deux morceaux, sont particulièrement intéres- sants. Un peu plus ancien doit être le fragmenten hauteur, à droite. Le dessin, très élégant, relève du genre dit « Bérain », du nom du dessinateur 18. du Roi, qui le créa. On ne peut malheureusement suivre son entier développement dans ce fragment trop étroit, qui semble découpé du magnifique volant, tout à fait pareil, existant dans la collec- tion de M. Alfred Lescure, à Paris. La pièce exposée à gauche, dans cette vitrine, — 40 — paraît être un arrangement, relativement mo- derne, de dentelles de la fin du XVIP siècle, ou même du commencement du siècle suivant. 19. C'est aux premières années du XVIIP siècle que nous rapportons le bas d'aube, déposé dans le même meuble, sous le n° 20 et qui provient de l'église de Tervueren. Les brides picotées qui constituent le fond de cette pièce ; les entrelacs, formés d'une sorte d'étroit lacet, qui y abondent ; les reliefs ou brodes qui relèvent le dessin, sont autant d'indices de son origine bruxelloise. Elle appartenait, d'ail- leurs, à l'église d'une commune, voisine de la capitale, ayant toujours eu des attaches très directes avec la Cour de Bruxelles. Le dessin nous montre, en dehors de vagues trophées de chasse, un aigle s'élevant vers le soleil, motif favori du règne de Louis XIV, puis un entrelacs formé des lettres E et C et enfin deux portraits juxtaposés et surmontés de la couronne impériale. — Ai — 19. L'étude de cette dentelle a démontré que les personnages représentés sont le roi Charles III, devenu depuis l'empereur Charles VI et sa femme Elisabeth de Brunswick: ce qui concorde avec le monogramme ci-dessus. )_ies cœurs enflammés, apparaissant sous les portraits, font présumer que la dentelle fut exécutée à l'occasion du mariage^des souverains, ce qui la daterait exacte- ment de l'année 1708. Le caractère général de la composition accuserait une date plus ancienne ; mais c'est l'occasion de faire remarquer que les dentelles belges retardent, le plus souvent, d'une trentaine d'années sur le style du jour, tel qu'on le trouve en France. 20. Le beau volant qui tapisse cette vitrine appar- tient, par son style, à l'époque Louis XIV. Il est à fond de brides picotées. L'intérieur des fleurs et des palmettes est partout occupé par un champ de mailles, dites à cinq trous, très en faveur dans le Brabant. La nervure centrale des palmettes se détache en relief, suivant la pratique bien connue de Bruxelles. L'ensemble de ces caractères ne permet pas de douter que ce morceau ait été exécuté dans la capitale. Cette pièce remarquable nous a été offerte par la Société des Amis des Musées Royaux de l'État, à Bruxelles. 21. La partie inférieure du meuble renferme, à gauche, un bas de surplis, montrant ce que la dentelle à fond de brides réalisait de plus léger et de plus délicat dans le genre courant. Au milieu d'autres spécimens, analogues au — 42 — précédent, se place, à droite, un objet qui mérite de retenir spécialement l'attention. C'est une faille minuscule, faite pour poser, par le milieu, sur la tête d'une statuette deVierge, aux côtés de laquelle le reste de la dentelle retombait en versants symé- triques. Le dessin en est charmant et l'on ne pour- rait imaginer un travail d'une plus grande finesse. Sans doute, cette dentelle est le fruit de la pieuse application de quelque béguine (on sait que les béguines étaient les maîtresses dentellières de l'époque), qui l'aura confectionnée avec amour, pour en parer la petite madone de son oratoire privé. 22. Les trois morceaux qui occupent la vitrine ver- ticale appartiennent à la catégorie de voiles, dits « de bénédiction ». Ce nom leur vient de ce que, suivant une règle liturgique, tombée en désué- tude, on s'en servait pour donner la bénédiction du Saint Sacrement. D'ordinaire, on les disposait, pendant l'office, sur le bord de l'autel, devant lequel ils retombaient en pointe. C'est ce qui explique la forme pointue de quelques-uns d'entre eux. 22. Ces voiles pouvaient aussi servir de vélums, qu'on plaçait, par respect, devant le Saint Sacrement, quand les fidèles étaient amenés à tourner le dos à l'autel, pour écouter le sermon, par exemple. Les voiles étaient, dans ce cas, — — montés sur étoffe et terminés, dans le haut, 43 par une barre suspendue à un pied de bois, posant sur l'autel. C'est à raison de ce mode de suspension, sans doute, que deux de nos spécimens ont eu leur bord supérieur coupé droit. Le plus ancien de nos voiles paraît être celui placé à gauche et portant l'image de Notre-Dame des VII Douleurs. Celle-ci se détache sur un champ de mailles rondes, dans un cadre, à ramages Louis XIV, dont les plats sont remplis de mailles à cinq trous, comme dans le grand volant de la vitrine précédente. Le reste du mor- ceau présente, sur un fond de brides picotées, d'élégants rinceaux, directement inspirés de la Renaissance et sur lesquels se détachent, aux quatre points cardinaux, des anges portant les attributs delà Passion. Cette pièce est d'une technique parfaite. Les toilés variés, de même que les jours et les reliefs qui décorent le vêtement de la Vierge, sont on ne peut plus habiles et précis. Ces qualités se retrou- 22. vent, du reste, dans les anges et dans l'ensemble du morceau qui remonte, pensons-nous, à la fin du XVIP siècle, ou aux premières années du XVIII®. Le voile du milieu représente un Pape, des _ — mains duquel 44 une princesse agenouillée reçoit, sans doute, quelque bulle de fondation. Au dessus du dais qui surmonte cette scène, on voit une représentation delà Vierge portant l'Enfant Jésus. Le fond de mailles sur lequel se détachent ces figures n'est plus formé de la maille ronde, ren- contrée dans le voile précédent, mais de la maille hexagone, dite drochel ou droschel, qui constitue au XVIIl® siècle, l'une des caractéristiques de la dentelle de Bruxelles. Les anges, timbaliers et trompettes, ainsi que le décor du reste de la pièce, sont disposés sur un fond de brides picotées. Nous retrouvons, cette fois encore, au coeur des ramages, spécialement dans la bordure, les mailles à cinq trous, dont la présence sera si souvent signalée dans les dentelles de Bruxelles et de Brabant. Nous ne pourrions que répéter, au sujet de la technique de cette pièce, de ses toilés, de ses jours et de ses reliefs, les éloges que nous décer- nions, à l'instant, au voile de Notre-Dame des VIT Douleurs. — 4o - 22. Le troisième voile, à droite, est consacré à l'Invention de la Sainte-Croix, par sainte Hélène. La croix vient d'être dégagée par le terrassier qui se tient là, debout, le chapeau à la main. L'impératrice, agenouillée, embrasse la relique fameuse, et, pour la soutenir plus respectueuse- ment, se couvre la main d'un mouchoir précieux. Dans le haut, la. croix triomphale, accostée d'une indication des plus intéressantes : la date 1720. Ici encore, c'est un champ de mailles drochel, qui sert de fond aux figures; c'est sur un jeu de brides picotées que se détachent les ornements. Nous j retrouvons, de même, les palmettes et autres motifs du décor, bourrés de mailles à cinq trous et sillonnés ou bordés de nervures en relief, tels que nous les montraient les diverses pièces, que nous venons d'énumérer, et dont l'étroite parenté s'affirme de la sorte. Ces trois voiles proviennent de l'ancien Bégui- nage de Bruxelles, très réputé, au XVIIP siècle, pour la perfection de ses ouvrages. 23, Dans la vitrine en face, on voit trois autres voiles. Celui du milieu nous montre, dans un robuste cadre Louis XIV, saint Jean baptisant le Christ. La composition est empreinte d'une 23. réelle grandeur et d'une noblesse qu'accentuent encore les dimensions peu communes de la pièce ainsi que les larges proportions données aux divers éléments du décor. D'autre part, la tecbni- que est fort belle, aussi bien dans les toilés que — 46 — dans les jours et dans le champ de mailles, tantôt rondes, tantôt hexagones, qui occupe le fond. Ce voile provient de l'église de Sainte-Catherine, à Bruxelles, laquelle dépendait autrefois de la paroisse de Saint-Jean-Baptiste, à Molenbeek, circonstance qui explique le choix du sujet repré- senté. Les deux voiles, à gauche et à droite, appar- tiennent à la Fabrique de l'église de Saint-Nicolas, à Bruxelles. Le champ du voile de gauche, se partage entre la grande maille ronde et le fond de brides picotées. Les toilés nous montrent clairement, à côté du point de toile proprement dit, le « grillé » à tex- ture losangée coupée d'un troisième fil. C'est le point que nous voyons constamment mis en oeuvre dans la dentelle de Brabant, qu'accusent égale- ment ici les larges fieurettes, plates et sans tige, qui s'étalent partout. T 23. Signalons encore, dans la bordure de côté, vers le bas du voile, un motif « en éventail », que Bruxelles possédait en propre, au milieu du XVIII® siècle et dont nous aurons l'occasion de reparler. Le voile à droite est fort curieux. Nous y retrouvons, sur un fond de brides picotées, les caractères que nous venons de relever au sujet de la dentelle de Brabant. Seulement les fleuret- tes, ainsi que les feuillages, les fruits et les autres éléments décoratifs, y sont ampliflés au point de devenir énormes et d'encombrer la com- position, qui en prend un aspect compact et lourd. Dans ces conditions, la dentelle est curieuse plutôt que belle, mais elle est, sans contredit, du plus haut intérêt au point de vue, tant de la technique que de l'histoire des inspirations den- tel lières. Nous saisissons cette occasion de remercier M. l'abbé Remès, le savant et distingué curé de Saint-Nicolas, ainsi que les membres du Conseil de fabrique, d'avoir bien voulu nous confler les voiles en question dans la louable pensée de servir l'étude de nos dentelles nationales. Quittons, un moment, les vitrines qui nous occupent, pour parler de quelques pièces, expo- sées au milieu de la galerie et que nous ne pou- vons manquer de rattacher aux précédentes. La grande dentelle, déposée dans la vitrine plate, n° 24, est la faille de Notre-Dame de Misé- — 48 - ricorde, appartenant à la Confrérie érigée, sous ce vocable, dans l'église de Notre-Dame de la Chapelle, à Bruxelles. Elle est de la deuxième moitié du XVIIP siècle. Le sujet principal, reproduit sur les deux ver- sants de la faille, représente la Sainte-Famille. Le décor qui l'environne, et qui s'étend d'ailleurs sur la pièce entière, est formé de ramages Louis XIV, à fond de brides picotées, traversés de jours où dominent, tantôt le point d'esprit, tantôt la maille à cinq trous et sillonnés des nervures caractéris- tiques de la fabrication de Bruxelles. Ce morceau, de dimensions considérables et d'une très bonne facture, date de la première moitié du XVIIP siècle. Il constitue un document important pour l'histoire de la dentelle bruxelloise et nous devons remercier les membres de la Confrérie de Notre-Dame de Miséricorde, qui con- sentent à nous le confier, en dehors des moments où les besoins du culte nécessitent sa présence à l'église. 25. Ce sont encore des voiles de bénédiction que nous retrouvons dans le meuble à panneaux, fai- sant suite au précédent. Le voile, à gauche, représentant le Baptême du Christ, porte la date 1759. Il provient de du l'église — — Béguinage, à Bruxelles, 49 laquelle formait, tout comme l'église de Sainte-Catherine, une dépen- dance de la paroisse de Saint-Jean-Baptiste, à Molenbeek. Il n'est donc pas étonnant que nous retrouvions sur le présent voile la scène que le voile de Sainte-Catherine nous avait déjà retracée. La forme en coeur, ou plutôt en poire, qu'affecte cet objet, n'est pas des plus heureuses et le carac- tère déjeté de la guirlande, sur fond de brides, qui encadre le sujet central, achève de lui donner un air asymétrique et gauche. L'enfilade de larges «jours « ovales, suspendus au pourtour de la scène principale, comme les perles d'un collier, est d'un dessin disgracieux et lourd. Il en est de même des « jours " qui s'arrondissent en cercle autour du Saint-Esprit. Mais, sous ces réserves, le voile est des plus intéressants par sa date, ainsi que par sa technique soignée, bien digne de l'époque florissante à laquelle il appartient. Contrairement à ce que nous avions rencontré jusqu'à présent, la maille drochel fait le fond de l'encadrement, tandis que les figures et la date 3 25. ont leur champ formé,'soit de grandes mailles hexagonales, simples ou picotées, soit de brides picotées. Contrastant avec son voisin, le voile, à droite, — 50 — est un modèle de légèreté et de bon goût. 11 représente l'Assomption de la Vierge, La figure principale, portée sur des nuages, d'où sortent des têtes d'anges, est un morceau de maîtrise, au point de vue de l'exécution des toilés, contour- nés de reliefs délicats, en même temps que des « jours » et des tramées de « points d'esprit », répandus sur la robe de la Mère de Dieu. La maille drochel règne dans tout le fond. L'intérieur des cartouches et des ramages, que remplissait la simple maille à cinq trous, durant la première moitié du XVlll® siècle, est occupé maintenant par des « jours » variés, d'une extrême délicatesse. 11 convient d'accorder également une mention à l'élégance, toute française, des bouquets et des branchages, dont la discrétion frise, du reste, un peu la maigreur. C'est le prélude de cette réac- tion de simplicité, qui marqua, dans la dentelle, comme dans la lingerie^ l'époque de Marie- Antoinette et donna la faveur aux larges champs de réseau. 26. Les trois voiles, exposés de l'autre côte de ce meuble, nous ramènent en plein esprit flamand. Celui du centre est l'un de nos morceaux les plus intéressants. 11 provient de l'église de Sainte- Catherine, à Bruxelles, où il dut Appartenir à — 51 — quelque confrérie de Notre-Dame d'Affligem. C'est, en eifet, cette vierge miraculeuse qu'illustre sa composition. Saint Bernard, en visite à l'abbaye d'Affligem, omit, un jour qu'il passait devant la statue de la Vierge, placée dans le cloître, de saluer cette dernière d'un Ave Maria, suivant la coutume de la maison; la Vierge l'en reprit spirituellement, en lui adressant elle-même la parole : « Je vous salue, Bernard, » parole qui mit d'ailleurs le comble à sa célébrité. Telle est la scène que rappelle la partie centrale de notre voile. L'ordonnance générale de la composition relève absolument du style Louis XIV. D'autre part, le fond de mailles, sur lequel elle se détache, est pareil à celui du voile de Notre-Dame des VII Douleurs, que nous dations, au plus tard, du commencement du XVIII® siècle. Le décor environnant semble cependant moins ancien et l'on y trouve déjà les formes en éventail, qui furent en faveur vers le milieu de ce même siècle. Nous serions donc disposé à placer aux environs de 1730 — 5-2 — 26. l'exécution de cette pièce remarquable, que nous devons à la générosité de Monsieur et de Madame Beernaert. Les deux voiles, à droite et à gauche, pré- sentent, dans le haut, cette forme coupée droite, dont nous avons parlé et qui s'explique par leur ancienne monture sur une barre de suspension. Le premier date de l'époque de Louis XV. Il représente, sur un fond, lozangé de points d'esprit, l'Agneau mystique, au-dessus duquel des anges soutiennent, d'une main, la couronne impériale, tandis que, de l'autre, ils balancent un encensoir. Dans le bas, l'inscription « Ecce Agnus Dei >», accostée de deux oiseaux. Plus bas encore, le monogramme de la Vierge. A gauche et à droite, saint François et saint Antoine de Padoue. Le reste de la composition montre des fleurs et des oiseaux, sur un fond treillissé, qu'aveuglent de gros pois, suspendus dans les interstices. Les remplissages, au moyen de la maille à cinq trous, se retrouvent ici, mais dominés par la pro- fusion des points d'esprit, pour lesquels l'ouvrière semble avoir éprouvé une vraie prédilection. Le voile, à gauche, paraît être un peu plus ancien, à en juger par le caractère nettement 26. Louis XIV de la composition, en même temps que par les mailles servant de fond au médaillon central, dans lequel se trouve représentée l'im- maculée Conception. Cette pièce, dans laquelle abondent les toilés — nuancés — et grillés, ainsi que les fleurettes très 83 aplaties, porte, par le fait même, les caracté- ristiques de la dentelle de Brabant. 27. Le cadre suivant renferme une sorte de voile, fait pour servir de devant de robe dans l'iiabil- lement d'une statue : ce qui explique qu'il ait la forme d'un trapèze, découpé à bords droits sur trois de ses côtés. Nous n'avons pas, croyons-nous, à insister sur la beauté de ce morceau, dont le sujet principal, d'une fort bonne composition, représenteles Ver- tus Théologales, dominées par l'œil de Dieu. En ce qui concerne la facture, nous nous trou- vons,denouveau, enprésenced'un réseau démaillés drochel, servant de fond aux flgures, tandis que le reste de l'ornementatio]! se détache sur un fond de brides. Les toilés et les « jours » rivalisent de finesse et de précision. Le grand chevron fleuri, dans lequel s'encastre la scène principale, est bordé d'une large bande, constituée par un champ de barrettes, entre lesquelles zigzaguent 27. des brides picotées. C'est l'apparition d'un motif favori de la dentelle bruxelloise, dont le principe s'annonçait déjà dans le premier des voiles de l'église de Saint-Nicolas. Il y a, çà et là, quelques rehauts de point à l'aiguille, autre pratique assez fréquente dans les — 34 — dentelles d'apparat, exécutées à Bruxelles. Cette belle pièce est accompagnée de man- chettes assorties, d'une exécution aussi parfaite que le reste. Un long usage l'a rendue si fragile qu'il n'était plus possible de s'en servir, sans risquer d'y causer des dégâts irréparables. C'est pourquoi la Fabrique de l'église de Notre-Dame de la Cha- pelle, à Bruxelles, à qui elle appartenait, a jugé préférable d'en assurer la conservation dans les collections de l'État. La somme nécessaire à son acquisition nous a été généreusement fournie par M. van der Strae- ten Solvay, devenu de la sorte le donateur de ce remarquable morceau. Tous les objets que nous venons de passer en revue, représentent de la dentelle aux fuseaux; l'aiguille y est à peine intervenue, de temps en temps, pour ajouter, par places, un accent plus ferme et plus riche. Les grandes pièces, entièrement travaillées à l'aiguille, sont rares à Bruxelles, avant le XIX® siècle. Nous en possédons cependant une dans notre collection et nous pouvons ajouter qu'elle suffit, à elle seule, pour témoigner du degré de per- fectionque ce genre deteclinique avait atteint chez nous. C'est le manteau de Vierge, exposé dans le cadre n® 28, adossé au précédent. Il provient de l'ahbaye d'Affligem, où il ornait, au XVIII® siècle, la Vierge célèbre, dont il fut question à propos du voile représentant le miracle de saint Bernard. Le manteau rappelle, à son tour, le miracle en question; il porte, en effet, inscrits aux deux extrémités du bord inférieur, les mots : « Ave Maria » et " Salve Bernar... « Nous savons qu'il fut exécuté « par Mascré, de Bruxelles, assistée d'une demoiselle qui habi- tait avec elle » et que cette personne l'offrit à Notre-Dame d'Aifiigem, en 1747 (1). La précision de cette date nous permet de faire remonter au deuxième quart du XVIIL siècle, le motifen éventail, que nous avons déjà signalé et qui se trouve reproduit ici tout le long de la bordure. Remarquons aussi les semis de fleurettes. (1) Nous devons ce renseignement à l'obligeance de D. Vincent Goosemans, de l'abbaye d'Affligem, qui l'a puisé lui-même dans un manuscrit conservé à l'abbaye de Termonde. - m — 28. ainsi que les vols d'insectes et de papillons, dont la présence va s'affirmer, de plus en plus, pendant la deuxième moitié du siècle. La pièce a, sans doute, des lourdeurs, duesprin- cipalement à l'opacité de l'aiguille dans les larges feuillages ; mais l'ensemble n'en est pas moins bien composé et justement approprié à la destination de l'objet, qui perd nécessairement à être ainsi étalé, à plat, dans un cadre, au lieu de s'arrondir, en plis moelleux, autour d'une statue. Quant à la technique, elle commande les plus grands éloges, tant pour la finesse et la régula- rité du « plat ", que pour l'extrême délicatesse et la variété des « jours ». La maille, qui fait le fond du réseau, entière- ment à l'aiguille, diffère beaucoup du point de gaze, généralement employé de nos jours. Néan- moins les dentellières de Bruxelles le con- naissent encore et lui donnent, nous ignorons pourquoi, le nom de « point un ». Ce manteau fait partie de la donation Monte- fiore, dont il constitue l'une des pièces capitales. Là se termine la série des voiles et des pièces « à sujets ». Il nous faut revenir maintenant aux dentelles plus courantes, que nous avons quittées, on s'en souvient, à l'époque des dentelles à brides, de la deuxième moitié duXVIP siècle. 29. C'est encore un volant de ce genre que nous retrouvons dans le cadre n° 29, adossé au couvre- pied d'Albert et Isabelle (rangée du milieu). 11 paraît un peu plus jeune que le volant analogue de la vitrine n° 18: le dessin en est plus clair, la — — disposition des brides plus régulière, la facture ^7 plus soignée. L'autre volant, placé dans le même cadre, offre de grandes analogies avec le précédent. Ce sont les mêmes jeux de lacets contournés, encadrant de leurs boucles des petits « jours », formés de mailles à cinq trous et de « grillé », ou se dilatant, par places, pour enclore de ces mêmes « jours », comme des îlots dans une rivière. Seulement, le fond de brides a disparu ; la dentelle se dessine entièrement sur un fond de réseau, formé d'une maille ronde, qui n'est autre que la maille primi- tive de Bruxelles, antérieure à la maille drochel et conservée principalement dans la dentelle de Brabant. Ce fond de réseau, ainsi que le dessin, dont les éléments sont empruntés, en grande partie, au genre « candeliere », nous font placer ce volant dans le dernier quart du XVIP siècle. 30. Nous retrouvons ces premières dentelles à fond de réseau dans le bas de vitrine, n° 30(à droite du cadre précédent). Les spécimens, placés à gauche, 3. S8 — 30. nous offrent les mêmes mailles rondes que le voile de Notre-Dame des VII Douleurs, exposé direc- tement au-dessus. Ils rappellent, du reste, ce voile à d'autres titres encore, notamment dans les picots. Le sujet guerrier de l'un d'eux est caracté- ristique de l'époque Louis XIV. Les trois morceaux qui s'étalent au centre de la vitrine et ceux à droite, datent du milieu et de la deuxième moitié du XVIIP siècle. Ils sont d'un excellent travail et constituent, peut-être, nos meilleurs spécimens dans le genre « civil ». Deux de ces jolies dentelles nous ont été offertes par M. Raoul Warocqué. 31. Les pièces exposées, vis-à-vis, dans le bas de vitrine n° 31, sont également d'une très bonne facture. Signalons spécialement les deux fragments de nappes d'autel, datés respectivement de I75I et de 1757, c'est-à-dire de l'époque de la plus belle technique des dentelles à fond de réseau. Ces morceaux, que leur date rend particulièrement précieux, nous ont été donnés par M. le baron vander Bruggen, ancien ministre de l'Agriculture. On voit, à droite, un specimen élégant, prêté par M™® Paul Errera et dans lequel nous signa- lerons spécialement de jolis « jours à écailles picotées. ■ I — 59 — 31. Dans la même vitrine, à gauche, une dentelle avec figures d'animaux, se détachant sur un mélange de réseau et de brides, mérite aussi de retenir l'attention. 32et83. Nous voyons encore des dentelles de Bruxelles, à fond de réseau drochel, dans les deux cadres 1)°® 32 et 33, placés à la muraille, en regard des vitrines dont nous venons de parler. Le cadre n° 32 contient des dentelles à dessin Louis XIV, notamment une pale, encadrée d'une dentelle de Binche. Dans le cadre n° 33, une autre pale, d'une composition originale, en style Louis XV, enea- drée d'un point de Paris, façon Malines. Le morceau, portant en rouge le n® 18 et placé immédiatement sous la pale, est d'une exécution remarf{uable. Les six cadres et vitrines qui vont suivre sont consacrés à la dentelle, dite de Brabant. Rappe- Ions donc, en les complétant, les caractères de celle-ci. Au point de vue du dessin, la dentelle de Bra- bant affectionne spécialement les grands motifs, les larges écussons ou médaillons, entre lesquels des bandes ajourées déroulent leurs rivières ou plaquent leurs vigueurs. Il en résulte, d'habi- tude, un contraste très marqué entre la masse opaque des toilés, souvent juxtaposés et la masse des parties claires, sur lesquelles ces toilés se détachent. - — Si l'on passe aux détails, 60 on remarquera la pré- sence, de toutes parts, de fleurettes larges et plates, réunies parfois en cordons ou en toufles et relevées de reliefs, aux fuseaux, qui en dessi- nent le pourtour ou le coeur. La technique de cette dentelle est caractéris- tique, notamment dans les toilés, très nuancés, allant du plat serré au toilé tout à fait clair et ajoutant encore à leur variété, par l'emploi, très fréquent, du grillé, cette sorte de toilé dessinant des losanges, que vient recouper un troisième fll. Une telle variété s'imposait, d'ailleurs, dans une dentelle qui a coutume de juxtaposer les toilés sur d'assez grands espaces, sans autre délimitation, entre eux, que des lignes de points clairs, dessinant les contours de leurs subdivisions. Les fonds sont également des plus variés. Ils comprennent des brides, toujours picotées, des « jours » et du réseau. Les «jours » se partagent entre le fond de neige, la maille à cinq trous, la grande maille hexagonale simple, plus rarement le point d'esprit, enfin, très fréquemment, les barrettes parallèles, reliées par des zigzags, hérissés de picots^ l'un des motifs favoris de la dentelle de Bruxelles. Le réseau est formé quelquefois de mailles drochel, mais, plus ordinairement, des mailles - - rondes, 61 que nous avons relevées, pour la première fois, dans le voile de Notre-Dame des VIT Dou- leurs. Par leur alignement rigoureux, joint aux vides minuscules, qui les séparent l'une de l'autre, ces mailles peuvent, un instant, faire l'effet d'être recoupées de lignes droites, comme dans le point de Paris ; mais ce n'est là qu'une illusion d'optique. 34. Les deux fragments de volants, exposés dans le cadre n° 34, constituent des morceaux exception- neis, au point de vue, tant de leur hauteur que de la richesse du dessin. Ils sont d'une virtue- sité à laquelle la dentelle de Brabant atteignit rarement. Nous les datons de la première moitié du XVIIP siècle. Ces belles pièces nous ont été offertes, l'une par M. Herman Stern, l'autre par M. Léon Grosjean. 35. Les volants du cadre n° 35 proviennent de l'église de Sainte-Gertrude, à Louvain. Ils sont d'une belle venue et, suivant l'expression consa- - 6-2 — 35. crée, simples et de bon goût. La maille drochel j intervient largement. Nous en plaçons l'exécution vers 1750. Ces trois volants présentent cette particularité qu'ils s'harmonisent parfaitement entre eux : ils constituent ce qui s'appelle une « garniture ». 36. Le volant, à fond de brides, de la vitrine n° 36, de même que le fragment analogue, exposé dans le cadre 39, s'écartent, au point de vue du dessin, de la règle reconnue pour la dentelle de Brabant. Nous ne retrouvons pas ici cette ampleur des motifs, dont nous avons parlé: les fleurs sont singulièrement isolées les unes des autres ; dispo- sées sans réelle ordonnance, elles ne forment pas même un dessin suivi. La dentelle de Brabant n'avait donc pas encore pris son aspect défi- nitif à l'époque où ces pièces furent exécutées, à savoir, au commencement du XVIIP siècle. On y retrouve, pour le surplus, tous les carac- tères du Brabant, les tollés variés, les mailles à cinq trous, etc. Le fragment de petit volant, dans la même vitrine, est d'une rare délicatesse. Le caractère profane de sa composition le ferait rentrer dans ce qu'on nomme les dentelles « civiles », beaucoup plus rares à rencontrer que celles à l'usage du culte. 37. La grande maille ronde et le fond de brides se partagent le champ du joli volant exposé dans la partie verticale de cette vitrine. Les « jours «, à barrettes parallèles, j jettent un heureux accent. Le volant peu élevé, placé au-dessus du précé- — - dent, représente le 63 type classique, le plus cou- rant, de la dentelle de Brabant ; ce genre fut employé beaucoup pour garnir les bas d'aubes. 88. Les deux spécimens de Brabant, exposés dans la vitrine n'' 38,. représentent un type très pur et bien caractéristique de ce genre de den- telles. Ils sont d'une extrême délicatesse et la légèreté de leurs tollés va jusqu'à la ténuité. La maille ronde, très courante dans le Brabant, forme le fond des médaillons^ entre lesquels s'interposent agréablement les vigueurs d'un fond de brides. [Collection Monteflore.) 39 Le cadre n® 89, placé à la muraille, renferme aussi des spécimens de dentelle de Brabant. L'un de ceux-ci, très peu haut, d'un dessin assez tour- menté, et d'une texture très serrée, présente des tollés remarquablement nuancés. Le moment est venu de parler des barbes, en dentelle de Bruxelles, aux fuseaux, exposées dans les vitrines 40 et 41, au milieu de la salle. íiCs brides de bonnet, qu'on appelle barbes, ainsi que les fonds de bonnet, qui s'y trouvent associés, entraient dans la composition d'un genre de coiffures, très goûté au XVI1Í® siècle. Lorsque la mode de ces coiffures eut pris fin, on - — démonta ces dernières. Les barbes 64 furent, le plus souvent, mises bout à bout, pour servir de era- vates. Les fonds de bonnet, désormais in utilisa- bles, s'en allèrent dans les tiroirs et les petites dentelles, qui les accompagnaient, se perdirent dans des utilisations de divers genres. L'art de la dentelle put s'exercer à plaisir dans cet article si coquet, dont les pièces, de formes diverses, lui fournissaient l'occasion d'harmoniser, sur un petit espace, des compositions variées et d'y répandre la virtuosité d'une technique raffinée. Malines, Valenciennes et Binche, autant que Bruxelles, produisirent, en ce genre, des quantités de beaux ouvrages ; mais ce fut Bruxelles qui l'emporta pour la richesse et l'originalité des compositions. 40. Le milieu du panneau A de la vitrine 40 est occupé par une barbe, à fond de brides minus- cules, constituées d'un simple fil, sans picots. Les toilés,très fins et l'elevés de brodes, voisinent avec des «jours «, dans lesquels domínele fond de neige. 40, La technique générale de la pièce n'est pas encore vraiment celle du XVIIP siècle. L'ordon- nance de la composition tient, d'ailleurs, beau- coup du Louis XIV. Aussi plaçons-nous l'exé- cution de ce morceau tout au commencement du — — XVIIP siècle. 65 Les autres barbes, ainsi que le fond de bonnet, exposés sur les panneaux A et B de la vitrine 40, forment une série de pièces sortant absolument de l'ordinaire. On n'y découvre pas le moindre fond de réseau. Les tollés, variés, comme dans la den- telle de Brabant, sont juxtaposés, sans autre interposition que des traînées de points clairs, ou de points d'esprit, du fond de neige, ou bien encore de minuscules brides, barrant de rares éclair- cies, qu'on prendrait, à première vue, pour des déchirures, plutôt que pour des « jours « inten- tionnels. La dentelle en retire un air d'opacité, contrastant étrangement avec l'aspect aérien, auquel nous sommes accoutumés. Aussi ces bar- bes nous parurent-elles, tout d'abord, assez énig- matiques. Mais les toilés annoncent le Brabant; les côtes en relief sont la marque de Bruxelles, dont nous retrouvons également ici les fleurettes favorites ; enfin, il existe une évidente analogie de facture, voire même de conception, entre ces barbes et le voile n® 2 de l'église de Saint- 40. Nicolas, très bruxellois, celui-là, dont les gros fruits et les fleurs démesurées s'étalent, de la même façon, en toiles contigus, traversés seule- ment de quelques éclaircies. C'est pourquoi nous avons rattaché à la fabrique — — de Bruxelles les barbes en question. 66 Une barbe du même genre existe dans la collec- tion de M. Samuel Chick, à Londres et Alan S. Cole, la plus grande autorité de l'Angleterre, en rapporte la fabrication àla petite ville de Lyme. Mais on sait qu'il était de tradition, en Angle- terre, d'imiter les produits bruxellois. La barbe, dont il s'agit, pourrait donc fort bien avoir été exé- cutée à Lyme, sans que nos conclusions en soient le moins du monde ébranlées. Nous daterions toutes ces barbes du commen- cement du XVIIP siècle. De la même époque doivent être, à notre avis, les deux pièces, fort rares, qui occupent le haut du panneau C, Elles sont à fond de mailles rondes, rigoureusement alignées, du genre de celles que nous avons signalées, dans le voile de Notre-Dame des VII Douleurs, comme devant se rapporter au commencement du XVIIP siècle, ou à la fln du siècle précédent. Le dessin à grandes fleurs, d'une ordonnance un peu solennelle, con- flrmerait pleinement cette attribution. 40. L'une de ces barbes, encore munie delà petite dentelle assortie qui longeait le fond, malheureu- sement disparu, nous a été donnée par M'^^Kefer Mali. 40et4i. Les - — autres barbes contenues dans cette vitrine, 67 de même que celles de la vitrine suivante, pré- sentent des types variés, du XVIIP siècle et com- prennent des morceaux d'une grande finesse. La plupart appartiennent à l'époque Louis XV. 41. On remarquera, surlepanneauDdelavitrine41, la garniture Louis XV, avec jours à barrettes parallèles, d'un fort beau travail, offerte au Musée par le comte et la comtesse Ferdinand de Marnix de Sainte-Aldegonde. Les barbes du panneau C sont plus récentes. Elles marquent l'établissement définitif de l'appli- cation sur vrai réseau drochel, genre dont nous allons également constater l'avènement dans les pièces plus grandes, auxquelles nous revenons maintenant. L'époque Louis XVI, nous avons eu déjà l'occasion de le dire, vit se produire dans la lin- gerie, comme dans d'autres articles de toilette, un esprit de ..simplicité, venu trop tard mallieu- reusement pour apaiser l'opinion, montée par les extravagances de l'époque Louis XV. C'est le règne de l'uni, le temps des fins linons, semés, par places, de fleurettes ou de sveltes bouquets. La dentelle suivit ce mouvement. On vit le fond de réseau grandir entre les fleurs, s'étaler de plus — — en plus, aux dépens du décor, devenu plus mince 68 et plus rare et préparer ainsi, presque fatalement, l'invention du tulle mécanique, appelé à le détrôner. A Bruxelles, ce fut la maille hexagonale, dite drochel, qu'on employa constamment en guise de réseau. Celui-ci s'exécutait de deux façons : autour des fleurs, en prenant ces dernières pour point d'attache, ou bien en pièce continue, à l'instar d'une pièce de tulle. Le travail le plus apprécié était évidemment celui qui s'exécutait directement autour des fleurs, se pliant à leurs contours et faisant corps avec elles. Cette technique se reconnaît aisément aux fils de réseau qui passent sous les fleurs, de l'un à l'autre bord, et qu'on aperçoit fort bien quand on retourne la dentelle. L'autre système consistait à exécuter du réseau à la pièce et à l'utiliser, par voie d'application, comme on le fit, plus tard, pour le^ tulle. L'ouvrière commençait, dans ce cas, par tra- vailler le drochel en bandes étroites, ne dépassant guère 3 centimètres en largeur, et longues à volonté. Ces bandes étaient ensuite réunies entre elles au moyen d'un point à l'aiguille, dit « point de raccroc» et l'on en formait des pièces, dontlalargeur — 69 — variait selon l'usage qu'on en voulait faire. Le fait est, du reste, confirmé par cette circonstance que, dans les champs de réseau d'une certaine étendue, on distingue parfaitement des stries longitudinales, distantes l'une de l'autre de 2 à 3 centimètres, et représentant la trace laissée par le point de raccroc. 42. Nous possédons, pour l'époque Louis XVI, un beau volant d'application sur vrai réseau, qu'a bien voulu nous confier M""® Paul Errera, bien- faitrice inlassable de nos musées, à qui la circón- stance de ces prêts de dentelles nous fournit l'occasion de dire notre reconnaissance. Ce volant, d'un dessin élégant, que nous ne nous occuperons pas de décrire autrement, dénonce fort bien la tendance, déjà rappelée, de l'ornement à se faire discret au profit du réseau, devenu de plus en plus envahissant. Ce dernier porte nette- ment les stries caractéristiques dont nous avons parlé. Le même cadre renferme une série de manches, 43. également à fond de réseau, marquant, les unes, l'époque Louis XVI, les autres la fin du Louis XV. 43. La vitrine n° 43 renferme une bonne série — 70 — d'applications sur vrai réseau, appartenant au premier quart du XIX® siècle. Ce sont, dans la partie verticale de la vitrine, à gauche, un voile entièrement travaillé aux fuseaux; à l'extrême droite, un voile dont les pièces appliquées sont faites à l'aiguille ; et enfin, au milieu, un voile de baptême, d'un dessin très élégant, associant les deux techniques, aiguille et fuseaux. 44. Dans la partie inférieure de la vitrine, on voit, au centre, un voile du même genre que les précé- dents et d'une exécution remarquable, au point de vue, tant du réseau drochel, merveilleusement souple et fin, que des fieurs aux fuseaux qui s'y trouvent appliquées. Ce morceau de premier ordre nous a été prêté par M""® Annemans, née van Volxem. A gauche, un coupon de dentelle, assorti au voile précédent et d'une facture tout aussi belle. Tout à côté, un beau coupon d'application aux fuseaux, pouvant dater de 1850 et néanmoins exécuté encore sur vrai réseau, d'une extrême - 44. finesse et d'une grande régularité. C'est un don de M. Arthur Warocqué. Au dessus de ces coupons, deux jolies voilettes, en application, aux fuseaux, sur vrai réseau, données, l'une par M™® Oswald, l'autre par M™® Charles Grognier. Dans la même vitrine, à droite, des spéci- mens délicats d'application à l'aiguille et aux fuseaux, toujours sur vrai réseau. Ces morceaux sont plus anciens queies précédents; ils remontent, en partie, à l'époque Louis XVI. 446,:s. Il en est de même des morceaux exposés dans le cadre n° 44òes (à la muraille). 45et46. Les cadres 11° 45 et 46, placés à la suite du cadre précédent, montrent des spécimens d'appli- cation à l'aiguille sur tulle mécanique. 47. Ce dernier genre se poursuit dans la vitrine n° 47, où se trouve exposé un beau volant d'appli- cation, mélange d'aiguille et de fuseaux. C'est encore à M. Arthur Warocqué que nous devons cet important morceau. 48. Nous n'avons eu, jusqu'à présent, l'occasion de parler du point à l'aiguille, de Bruxelles, que 48. d'une façon presque accessoire. Sa présence a été signalée dans certains voiles, où sa discrète intervention se bornait à introduire, çà et là, quel- ques touches plus fermes et plus précises. Nous l'avons également rencontré dans le genre « appli- — 72 — cation décorant le vrai réseau et le tulle, soit seul, soit associé à la dentelle aux fuseaux. Mais, dans un cas seulement, nous avons pu lui rappor- ter la production exclusive d'une oeuvre impor- tante, à savoir le manteau de N. D. d'Affligem. Il ne faudrait pas en conclure nécessairement que les pièces en point à l'aiguille fussent si exceptionnelles que cela dans notre pays. La dentelle aux fuseaux y primait, sans doute, tout le reste; mais on a dû y faire de l'aiguille, en quantité suffisante, pensons-nous, pour que nous ayons à nous préoccuper de combler la lacune que semble présenter, à cet égard, notre collection. On a pris souvent pour du point à l'aiguille, de Bruxelles, des produits d'Alençon et d'Argentan. Nous avons cru devoir restituer à ces dernières fabriques divers morceaux qui se trouvaient clas- sés autrefois parmi les dentelles de Bruxelles. On rapporte, au surplus, que les fabricants d'Alençon envoyaient parfois leurs fleurs à Bru- 48. xelles, pour y être montées ou appliquées sur vrai réseau : circonstance peu favorable, il faut en convenir, à l'hypothèse d'une fabrication courante du point à l'aiguille, à Bruxelles. Nous possédons deux spécimens de ce mélange d'aiguille et de — 73 — fuseaux, qui sembleraient devoir donner crédit à pareille tradition. Ils se trouvent exposés dans la vitrine n® 48, réservée au point à l'aiguille du XVIIB siècle. Nous sommes, dès à présent, mieux partagés, en ce qui concerne les dentelles modernes, où, à la différence de ce que nous avons vu jusqu'ici, le point à l'aiguille tient la première place parmi les objets exposés. 49. Le cadre n° 49 renferme d'intéressants spé- cimens de point à l'aiguille, exécutés à Bruxelles, au cours des quarante dernières années. Ils ont été offerts au Musée par Minne Dansaert, M"'® Paul Errera et M. Raymond Siméons. 50. Les éventails et les pièces détachées, pour éventails, exposés dans le cadre 50, sont encore du point à l'aiguille. Ils proviennent de la maison Minne Dansaert, à Haeltert. L'un d'eux, exécuté pour l'Exposition de Liège, en 1905, est formé 4 de sujets représentatifs des neuf provinces belges et du Congo. 11 est d'une belle technique. L'éventail plus petit, d'une jolie composition et d'un travail au moins aussi bon que le précé- dent, est un don de M inné. Le cadre suivant réunit des dentelles à l'ai- guille, exécutées en Belgique, mais s'écartant des types habituels de Bruxelles ; a) Point de Venise, de la fabrication de Minne Dansaert et donné par celle-ci au Musée. Le losange, en point à la rose, d'une technique remarquable, a été exécuté spécia- lement à notre intention ; b) Animal fantastique, d'un beau travail, don de M. Berghaus ; c) Panneau décoratif, à figures et sujets anciens, acquis de la maison Lava, à Bruxelles. La série qui précède est très heureusement couronnée par un ensemble de dentelles, de la fabrication de feu Léon Sacré, de Bruxelles, en souvenir de qui, sa sœur, M"'® Eugène Marlier et les enfants de celle-ci, les ont généreusement offertes au Musée. C'est, d'abord, une échai^pe, en application sur tulle, aiguille et fuseaux, d'un agréable dessin, et d'une exécution remarquable. L'éventail, en point à l'aiguille, qui raccom- pagne, à droite, ne lui cède en rien sous ce double rapport. Nous n'hésitons pas à déclarer, d'accord avec des spécialistes très autorisés, qu'on ne pourrait rencontrer, dans les deux genres qui viennent d'être dits, des spécimens mieux compris, ni d'une technique plus parfaite. Quelques morceaux de moindre importance, mais d'une grande finesse également, complètent cette belle démonstration du savoir-faire bruxel- lois. Leportrait de Shakespeare, enpointà l'aiguille, est étonnant de précision. Le point de Venise, dit point d'ivoire, exécuté dans les ateliers de Bruxelles, en 1882, ne laisse rien à désirer, non plus, au point de vue de la technique. On doit en dire autant du point à l'aiguille, montrant des palmes et des guirlandes, se dérou- lant sur un fond de point gaze » et datant éga- lement de 1882. Le fragment de robe, en point à l'aiguille, dans le petit cadre, à gauche, est d'un travail moins raffiné, sans doute, que les pièces plus petites dont il vient d'être question ; mais le caractère même de l'objet réclamait une exécution plus r — 76 — 52. robuste, visant, avant tout, à donner une imprès- sion décorative. Enfin, dans le grand cadre, à droite, le coupon de dentelle, entièrement aux fuseaux, remontant à 1879, nous montre que Léon Sacré, au lieu de se cantonner dans le travail à l'aiguille, cherchait à faire également « très beau » dans le domaine des fuseaux, et qu'il j réussissait. Le superbe don que nous a fait sa famille est un magnifique hommage rendu à la mémoire de ce dentellier, sincèrement épris et respectueux de son art, qu'il éleva, peut-on dire, au plus haut degré de perfection que la dentelle de Bruxelles ait atteint dans ces dernières années. Flandre. 53 à 55. Ainsi que nous l'avons dit en commençant, les premières dentelles, fabriquées dans les différents centres des Pays-Bas, étaient confondues, à l'étranger, sous la dénomination générale de den- telles de Flandres. Les spécimens que nous expo- sons, sous ce nom, dans les cadres 53 et suivants, pourraient donc être revendiqués par d'autres centres encore que la Flandre proprement dite. Ils comprennent surtout des picots, des dents h 53 à55. et des « becs w (autrefois, on disait » bicques »), dont on bordait les objets de lingerie. Parmi ces derniers, les célèbres fraises de la dernière moitié du XVP siècle et du premier quart du XVIP, furent garnies principalement de point à l'aiguille; mais les dentelles aux fuseaux inter- vinrent largement dans les grands cols retom- bants de l'époque Louis XIII. 56. Vers le milieu du XVIP siècle, les « becs » s'accusent de moins en moins et, finalement, ne se traduisent plus que par une sorte d'ondulation du bord inférieur de la dentelle. Le cadre n° 56 nous montre, au-dessus d'une dentelle de ce genre, d'une technique assez rude, mais d'un joli dessin, deux spécimens d'une sorte de torchon, dans lesquels nous ne pouvons guère voir autre chose que des dentelles paysannes. Les morceaux qui les surmontent sont des dentelles à brides, de la deuxième moitié du XVIP siècle. 57et58. Les cadres 57 et 58, nous montrent également des dentelles à brides, exécutées, pensons-nous, dans la Flandre proprement dite. Nous y voyons se dérouler, tantôt de grands feuillages et des 57et58. ramages, dans le styleduXVIP siècle, tantôt des entrelacs fleuronnés, du type commun à la Flandre et à l'Italie. Ce genre de dentelles fut utilisé princi- paiement pour les garnitures d'aubes. — 59 Des bas d'aube, à fond de brides, - occupent 78 également le cadre n° 59 adossé à la vitrine voi- sine. Ceux du bas, conçus dans le style « candeliere », du temps de Louis XIV, se rapprochent sensible- ment des spécimens que nous avons rencontrés à Bruxelles, vers la fin du XVIP siècle. Mais ils sont moins fins et moins soignés ; leurs brides picotées, de même que leurs mailles à cinq trous, laissent beaucoup à désirer; enfin, ils ne montrent plus les brodes caractéristiques de la dentelle du Brabant. Le volant supérieur, plus élégant, reproduit les ramages italiens, « a fiorami », qui demeu- rent, en somme, ce que la Flandre a produit de plus marquant, en fait de dentelles à fond de brides. 60. La vitrine n° 60 contient les spécimens de Flandre, à fond de réseau. On confond souvent ces dentelles de Flandre avec celles de Milan, qui leur ressemblent, du 60. reste, à première vue. Mais les dentelles de Milan se distinguent par ce fait, qu'en dehors de cas exceptionnels, tels que la représentation de figures ou de grands ornements, leurs toilés affectent presque toujours l'allure d'un lacet, de largeur — 79 - uniforme, se repliant sur lui-même, ou contour- nant les espaces occupés par les « jours. « Les toilés de Flandre, au contraire, s'étalent et se profilent, « en pleine pâte », peut-on dire, suivant les besoins du dessin. Alors même qu'ils prennent le caractère vermiculaire des dentelles du Midi, ils ne le font qu'en se dilatant et se rétré- cissant sans cesse, de façon à perdre complète- ment l'air de lacet qu'ils revêtent à Milan. La texture des toilés n'est pas, non plus, pareille, ce qui tient, en partie, à la qualité du fil, moins fin dans le Midi et rendant, dès lors, les toilés de Milan, non pas plus serrés, peut- être, mais plus compacts que ceux du Nord. Nous signalerons d'abord, dans la vitrine n® 60, une sorte de mante, d'arrangement assez récent, formée de dentelles de Flandre, marquant, à notre avis, la transition entre la bride et le réseau. Cette pièce, que nous devons à l'aimable générosité de M""® Goldscbmidt-Przibram, est entièrement bordée d'une dentelle de Flandre, 60. du temps de Louis XIII, fort bien conservée et d'un type très intéressant. Ce sont ensuite, vers la droite, des ramages à fleurons, poursuivant les traditions de dessin des dentelles à brides, tout en laissant entre les — ~ fleurs les espaces plus grands que comportait le 80 fond de réseau. Au milieu de la vitrine, sous la mante, une jolie dentelle religieuse, portant l'image et le monogramme de la Vierge. A gauche, en haut, une autre dentelle, ayant servi d'encadrement à quelque voile, où ce même monogramme se trouve associé à celui du Christ. 61. Les dentelles de Flandre à fond de réseau se poursuivent dans le bas de la vitrine. Les toilés y atteignent un haut degré de délicatesse. Nous signalerons spécialement, à cet égard, les trois petits morceaux, placés à droite et que nous a donnés M. Georges Moens. 62. Les dentelles contenues dans le cadre n° 62 (à la muraille), nous paraissent appartenir aux premières dentelles au fond du réseau. On peut, sans doute, les rattacher à la Flandre, où elles viendraient se ranger dans le genre, dit « Trolle- kant«. Mais on y retrouve des traits qui dési- gneraient d'autres centres encore. La technique de Valenciennes, par exemple, s'y montre nette- ment, sous une forme grossière, il est vrai, mais avec tous ses caractères. Cette technique procé- dait de la Flandre, on le sait. Ce furent, peut-être là, ses premières productions à fond de réseau, - ou 81 — bien encore, simplement, les modèles qui lui four- nirent son point de départ. Malines Dès qu'on se mit à faire de la dentelle en Bel- gique, Malines prit certainement part à sa produc- tion. L'on y fabriqua donc, sans nul doute, des guipures et des dentelles à brides, avant l'intro- duction des fonds de réseau. Cette ville pourrait, dès lors, comme d'autres encore, revendiquer, pour partie, cet ensemble de guipures primitives et de picots, que nous avons classés sous le nom de Flandres, qu'on leur donnait alors. Mais la grande renommée des dentelles de Malines ne date que du XVIIP siècle, époque à laquelle elles acquirent une vogue extraordinaire. Les fleurs de la Malines, d'un toilé générale- ment peu serré, accusent leurs contours par un fil plus gros, qui les borde, à la diflerence des Valen- 4. ciennes et des Binche, où la limitation des toilés n'est pas soulignée de la sorte. Le réseau varie. Quand il se travaille avec des épingles (spellewerk), il rappelle le point de Paris. Mais on l'exécute aussi sans épingles — — (eisgrond), par un tour de main, dont 82 Malines avait le secret et dont l'accent, nécessairement plus personnel, fit, en partie, le charme de la « reine des dentelles », ainsi que la Malines fut appelée souvent. « Après avoir suivi, dit M. Lefébure, les mêmes tâtonnements que la Valenciennes pour le choix d'un fond qui lui soit bien approprié, après avoir employé souvent aussi le fond de neige, la Malines a adopté unepetite treille ronde, très légère et très fine, qui est certainement la plus jolie de toutes les mailles aux fuseaux... Très à la mode sous Louis XV, elle a beaucoup exploité les dessins rocailles... Sous Louis XVI, elle exécuta avec succès les guirlandes et les enlacements ajourés et quand on en vint aux petits semis, la Malines allia merveilleusement ces dessins très légers avec la transparence et la régularité de ses jolies petites mailles. Il n'est pas une dentelle qui assortisse mieux avec la gaze et la mousse- line. Elle est délicieuse en barbes et en coif- fures et nos grand'mères savaient fort apprécier comme elle se chiffonne agréablement parmi les cheveux blancs. » Nous tenions à reproduire ce jugement d'un écrivain français, fort distingué, qui a fait de la dentelle l'objectif de sa vie et dont le goût par- fait, en pareille - matière, - est bien connu de tout le 83 monde. Ses paroles nous arrivent comme un écho de la façon dont la France adopta la Malines au XVIll® siècle et de la faveur extrême que cette dentelle y rencontra durant toute cette période. Les vitrines 63 et 64 contiennent une collection de barbes de Malines, dont plusieurs d'un très beau dessin et d'une facture excellente. 63. Ce sont d'abord, dans la vitrine n° 63, celles dont le fond est formé de la vraie maille de Malines (eisgrond). Cette maille se travaillait d'une façon plus ou moins serrée, suivant le caractère qu'on voulait obtenir, ou même simplement suivant les habitudes de l'ouvrière. On remarquera, sous ce rapport;, des écarts importants entre certains de nos morceaux, dont les uns montrent des mailles largement ouvertes, tandis que d'autres ont les mailles serrées au point de donner presque l'im- pression d'un tissu. Les barbes de cette vitrine (faces A, C, D),appar- tiennent, pour la plupart, à l'époque Louis XV. Un peu plus ancien, si l'on en juge par le dessin, serait l'intéressant morceau qui occupe la face B de cette même vitrine. La pièce en question nous oifre le jeu complet - 84 — des dentelles qui entraient dans la composition des « coiffures », qui furent très à la mode au XVIIL siècle et pendant une partie du XIXL Ces dentelles se présentent ici comme formant, à elles seules, la coiffure entière ; et la façon précise dont elles s'emboîtent, ferait croire qu'elles ser- virent vraiment, de cette manière, simplement posées sur la tête, comme une sorte de fanchon. Mais il est certain que les dentelles de cette catégorie se sont prêtées à d'autres arrangements encore. Les restes de linon ou de réseaux divers, qu'on y trouve parfois attachés, prouvent bien qu'on les combinait aussi avec de la lingerie, ce que confirmerait, en outre, la présence habituelle d'une engrêlure au pourtour du « fond ». Ce dernier a donc pu constituer, dans certains cas, un vrai « fond de bonnet » et ce serait à bon droit, dès lors, que la dénomination lui en serait restée, 64. Dans la vitrine suivante, se placent les barbes « façon Malines », c'est-à-dire ayant des fleurs contournées du gros fil plat, comme dans la Malines, mais dont le fond, au lieu d'être formé des petites mailles malinoises, est constitué par — 85 — une maille tout autre, ou par un point de fantaisie. Le fond de neige, dont la dentelle de Bincbe s'est approprié si complètement le type, a été utilisé fréquemment à Malines; seulement, les points de neige, au lieu d'être jetés pêle-mêle, comme à Bincbe, sont, dans la Malines, disposés, d'ordinaire, avec une régularité qui leur donne la valeur d'un « jour », plutôt que d'un simple fond. Les barbes, qui s'étalent sur la face A de la vitrine 64, sont de riches spécimens de ce genre. La cravate, formée de deux demi-barbes, por- tant le n° 228 rouge, a pour fond une sorte de treillissage, que les dentelliers modernes ont baptisé du nom « d'armure ». Ce fond est d'une grande transparence et d'une rare légèreté. Les deux demi-barbes de la face B rentrent plus complètement dans la formule binchoise. Il eût même fallu les classer parmi les Bincbe, n'était le fil de contour des toilés qui les rattache à la Malines. C'est de la Malines, « façon Bincbe ». Le fond de bonnet, exposé au-dessus, est formé de deux pièces, juxtaposées en contre partie. L'effet est, sans doute, plus fâcheux que si le mor- ceau avait été travaillé d'une pièce. Mais cette défectuosité était compensée par une facilité d'exé- cution beaucoup plus grande et, partant, par un — 86 — prix de revient très réduit. Les faces C et D de la vitrine réunissent un certain nombre de pièces « en forme «, ou de composition spéciale. Citons notamment, pour la face C : Une garniture de tabernacle (n° 55 rouge), à fond « armure portant la date de 1751 ; Une autre garniture de tabernacle, datée de 1739, avec l'inscription : ^um panis vitss. Les jolies fleurettes de Malines y sont malheureuse- ment entremêlées de figures d'anges, tout à fait grotesques ; Une paire de manches, avec petite dentelle as- sortie, façon Malines, mais sur fond de mailles à cinq trous, de l'époque Louis XV ; Un col Louis XV, se distinguant par ses jolis « jours » et par l'épaisseur de son fll de contour. Sur la face D : des garnitures, dont nous n'apercevons pas bien l'usage, encore montées sur leur ancien tissu et montrant le jeu de tirettes par lequel on les ajustait. 65 et 66. La vitrine 65-66, également consacrée à la Malines, contient les spécimens de dentelles cou- rantes : dans le bas, celles du XVIIP siècle; dans la partie verticale, celles du XIX®. La technique est, sans doute, restée bonne dans ces dernières ; mais — ~ on demeure frappé de 87 voir combien la composition en est courte, mono- tone et pauvre, en comparaison des jolis dessins, variés et coulants, qu'avait produits le siècle pré- cèdent. Deux spécimens seulement pourraient être cités comme faisant exception; ce sont, dans la rangée de gauche, le n° 61, don de M™® Gossey et le n® 101, prêté par M""® Annemans. Mais, pour le surplus, la pauvreté d'invention, que nous signa- Ions, se remarque jusque dans les pièces visant à une certaine richesse, telles, par exemple, que le voile disposé au centre de la vitrine. Ici encore, c'est l'éternelle fleurette qu'on aperçoit partout. Sous prétexte de se faire plus cossus, les bouquets se sont simplement alourdis et s'imaginant accroître leur importance, ils ont naïvement étagé leur motif unique sur deux files, que ne relie entre elles aucune attache. - 881- Anvers. 67 et 68. Les dentelles de la vitrine n°® 67-68 tiennent encore des Malines; mais elles s'écartent, à V certains égards, du type pur de ces dernières. L'industrie à laquelle elles correspondent est celle de la province d'Anvers, prise dans son ensemble. On y voit des spécimens du célèbre Pottekant, dentelle pour bonnets, où dominent les gros vases de fleurs qui lui ont donné son nom. Puis c'est le Trollèkant, à la dénomination mal élucidée jusqu'à présent, et dans lequel les points et les fonds les plus hétérogènes sont souvent associés d'une façon bizarre. Nous avons déjà dit, du reste, que le Trolle- kant est une dentelle des Flandres, aussi bien que de la province d'Anvers. Ce sont ensuite des dentelles « façon Malines , exécutées sur fond de mailles à cinq trous, armure, point de Paris, maille flamande, etc. Nous y avons joint quelques spécimens de la dentelle dite « de Hollande ». Les fleurs n'y sont pas accompagnées du tra- ditionnel fll de contour et le fond en est formé, soit de maille flamande, soit d'une sorte de fond de neige. Ce genre n'a donc rien à voir avec la M alines et il se rattacherait plutôt aux Valen- ciennes ; mais il s'est fabriqué, spécialement pour la Hollande, dans le nord de la province d'An- vers, à laquelle la présente vitrine est consa- crée. Nous ne pouvions donc lui donner d'autre — — place. 89 On remarquera, dans la partie verticale de la vitrine, une nappe de communion, façon Malines, à fond de fantaisie, déroulant une frise élégante, plaquée de médaillons, représentant des scènes de la Bible : Eliézer, la Manne, le Sacrifice d'Abra- ham, etc. Nous la datons de l'époque Louis XVI. (Collection Montefiore.] Au-dessus de ce morceau s'étale un bas d'aube, dont l'intérêt réside surtout dans les dimensions des fieurs et du réseau dont il est formé. Ayant à dessiner un volant un peu plus haut que de cou- tume, l'artiste n'a rien trouvé de mieux que d'agran- dir une petite dentelle qu'il avait sous la main et de l'exécuter, sans autre changement, à cette échelle démesurée. La pauvreté du motif n'en éclate que davantage, sans que la netteté de l'exécution parvienne à la racheter. Valenciennes et Binche. Le genre Valenciennes comprend les Valen- ciennes proprement dites et les dentelles de Binche. Le trait caractéristique, commun à ces — 90 - deux espèces de dentelles, réside dans le tollé, d'un aspect très plat et qui touche directe- ment le fond, sans interposition d'aucun fil de contour. Valenciennes. Il se fit certainement des dentelles, à Valen- ciennes, dès la première moitié du XVIP siècle. C'étaient des dentelles à fond de brides, puisque le fond de réseau n'apparut que plus tard. Nous ne possédons point de spécimens de cette époque. Au milieu du XVIP siècle, l'industrie dentel- lière, qui s'était répandue déjà aux environs de la ville, se déplaça davantage vers nos provinces, principalement du côté de la Flandre occidentale, où la ville d'Ypres rivalisa bientôt d'importance avec Valenciennes même. Les productions de ces deux centres se confondent au XVIIP siècle, du moins au point de vue do la technique. La Révolution française porta un coup fatal à Valenciennes, où la dentelle sombra complè- tement, pour reprendre légèrement au siècle suivant, et disparaître enfin d'une façon définitive. L'industrie résista mieux dans notre Flandre, devenue l'unique refuge de la dentelle de Valen- ciennes ; l'on peut même dire, qu'en principe^ - — toute la Valenciennes du XIX® siècle vient de là. 91 C'est, du reste, en Belgique que l'on a trouvé, pour le réseau, la maille carrée, inaugurée au siècle dernier. Avant cela, l'on n'employait que la maille ronde, laquelle n'était autre chose que l'ancienne maille flamande. Si nous ajoutons, enfin, que la ville de Valen- ciennes faisait, au temps de sa première prospé- rité, partie intégrante des Pays-Bas, nous en aurons dit assez, pensons-nous, pour nous justifier d'avoir rangé la Valenciennes parmi les dentelles propres à la Belgique. La Valenciennes est essentiellement une den- telle de lingerie ; elle est d'un aspect plus « linge » qu'aucune de ses sœurs. Ce qu'elle vise n'est point la richesse; elle ne recherche pas le grand effet ; mais il se dégagede ses blancheurs, souples et fondues, une impression de netteté et de fraîcheur, qui fut la source première de son succès. Nos spécimens comprennent des volants cou- rants, des barbes et des pièces en forme. Les volants ne sont jamais bien hauts ; leurs dessins, assez riches parfois, mais simples d'ordi- naire, sont presque toujours d'une élégance, que relève une technique soignée. - - 69. Le cadre n° 69 en renferme de jolis spécimens, 92 datant du XVllP siècle et de la première moitié du X1X^ Dans le bas du cadre, une série assez étendue de barbes et de demi-barbes présente des exem- pies variés de ce que le XVIIP siècle a produit en ce genre. Les pièces en forme, ou à dessins spéciaux^ furent toujours, on le comprend, particulièrement soignées. Nous devons la plus jolie de celles que nous présentons ici, à l'obligeance de M. Robyn- Stocquart, qui nous l'a confiée pour quelque temps. Suivant une tradition de famille, cette dentelle, qui occupe le milieu du cadre n" 69, provient de Marie-Antoinette, pour qui elle aurait été faite, à l'occasion de la naissance du Dauphin. Les lys de France, joints aux flambeaux d'hy- ménée et aux dauphins qui décorent si joliment ce précieux morceau, confirment à souhait cette illustre provenance. A remarquer également, au-dessus de la den- telle précédente, les oiseaux becquetant des 69. grappes de raisins et, dans le bas du cadre, cinq curieux boutons maçonniques. [Collection Montefiore.) — — Binche. 93 La dentelle de Binche se rattache à la famille des Valenciennes, par ses toilés, d'abord, que ne borde aucun ñl de contour, puis encore par la maille qu'elle met en oeuvre, quand il lui arrive de montrer du réseau, maille qui n'est autre que celle de Valenciennes. Elle se distingue des Valenciennes proprement dites par la texture spéciale de ses toilés, à la fois plus ténus et plus nuancés, donnant une impression de transparence, qui contraste absolu- ment avec la netteté uniforme des toilés, plus serrés, de la Valenciennes. La dentelle de Binche fait, en outre, grand usage des points clairs pour diviser ses toilés, souvent juxtaposés et pour leur donner, en même temps, plus de légèreté. Cette dentelle se caractérise, enfin, par une prédilection des plus marquées pour ce qu'on nomme le fond de neige. Elle ne se borna pas, comme à M alines et à Bruxelles,' à en former des «jours 55 réguliers; chez elle, les mouchetures étoi- lées pénétrent partout, diversifiant leurs aspects, se juxtaposant, sans souci delà symétrie et finissant par substituer entièrement leur péle-mêle, sédui- sant du reste, au fond de réseau des dentelles -194 - plus compassées. Les spécimens, réunis dans la vitrine verticale n° 70, comprennent, à gauche, des morceaux dans lesquels nous sommes tenté de voir de la den- telle de Binche, à fond de brides. Les petits coupons, placés au milieu et à droite, marquent l'évolution vers le fond de neige pur. La longue pièce, de faible hauteur, placée dessous, rentre, de nouveau, dans le type mélangé de brides. Son dessin nettement Louis XIV nous la ferait rapporter à la fin du XVIP siècle. Cet objet servit probablement de bas de rochet. Les dentelles de Binche n'étaient pas hautes, en général. Le volant, à trois étages, cousus ensemble, qui s'étend sous la pièce précédente, montre la façon dont on se tirait parfois d'aifaire lorsqu'on voulait obtenir une pièce de Binche ayant plus de hauteur. La candeur du procédé fait, un peu, son excuse; mais l'effet de l'ensemble n'en demeure pas moins fâcheux. 71 Dans d'autres cas, on se donnait plus de peine pour suppléer à cette inaptitude de produire direc- .ement des dentelles un peu hautes. Le grand bas d'aube, à personnages, exposé dans le bas de la vitrine n° 71, nous en fournit un exemple remar- — 95 — quable. Le dessin embrasse toute la hauteur du volant ; mais, pour l'exécuter en dentelle, on l'a découpé en fragments irréguliers, de hauteur moindre. Ces fragments ont été ensuite habile- ment rapprochés par des jointes, dont on suit fort bien la trace, tout le long de la dentelle, vers la moitié de sa hauteur. Le volant qui nous occupe, bien que s'écar- tant de la formule habituelle de la dentelle de Binche, porte des caractères binchois indé- niables, notamment ces tollés nuancés, trans- parents et sillonnés de points clairs, qui ne se ren- contrent guère ailleurs, à un tel degré. Le fond de neige n'intervient, il est vrai, que dans les «jours », sans déborder dans le champ même de la dentelle, entièrement formé d'un fond de mailles. Seulement ces dernières sont des mailles flamandes, les mailles de la Valenciennes, celles auxquelles Binche a eu recours, chaque fois qu'elle ne travaillait pas uniquement sur fond de neige, mailles qui, du reste, nous l'avons dit, retiennent encore le nom de Binche dans le lan- y gage professionnel. 71. Nous tenons donc le volant en question pour une dentelle de Binche, quitte à le qualifier de pièce exceptionnelle et à marquer d'autant plus vivement notre reconnaissance à M™® Gold- schmidt-Przibram, qui eut la bonté de nous — 96 ™ donner ce morceau, sans doute unique. Chose rare, la composition se déroule d'un bout à l'autre, sans aucune répétition. On y voit, vers la gauche, la grappe de Chanaan, gravement portée par des personnages, en costume Louis XIV. Plus loin, c'est le char de la Religion, entouré d'une inscription : Jubilante apostóle, opus hoc suavissimo Jesu donant, montrant que la dentelle fut certaine- ment exécutée à l'occasion de quelque jubilé sacer- dotal. Les dimensions plus grandes données aux lettres chronographiques, notamment dans le mot « jubilante », annoncent un chronogramme, d'où se dégage la date 1730. En poursuivant vers la droite, on trouve un personnage, en costume civil, du temps de Louis XIV, entouré de figures et d'inscriptions, évidemment en rapport avec l'événement que la dentelle voulait célébrer. Plus loin encore, se voit l'Agneau mystique, couché sur le livre aux sept sceaux. La date de 1730, relevée ci-dessus, nous paraît bien rapprochée, étant donnés non seulement la nature de la dentelle et les caractères du dessin, mais encore le costume des personnages, qui dénoterait plutôt la fin du XVIP siècle ou les premières années du siècle suivant. Mais il faut bien s'incliner devant le fait, quitte à conclure — 97 — que le dessinateur retardait quelque peu sur les modes du jour. Ajoutons que cette dentelle passe pour avoir été exécutée dans un couvent de la province d'Anvers, peut-être par quelque religieuse venue du Hainaut. Les autres dentelles de Binche, exposées dans cette vitrine n° 71, ont, à côté du point de neige, une partie de leur fond formée de véritables mailles. Ce sont les mailles de Valenciennes, dites aussi mailles fiamandes ; les dentelliers modernes leur donnent encore, nous l'avons dit, le nom de point de Binche. La vitrine n" 72 renferme, enfin, les dentelles de Binche, de la dernière manière. Le fond de neige y règne seul et les toilés y atteignent une ténuité encore plus marquée qu'aux époques précédentes. Nous y signalerons spécialement un beau mou- choir, prêté par M™® Emile Goossens et une magnifique barbe du XVIIP siècle, appartenant à M"® Hélène Godtschalck. 5 73 à 76. Nous avous réuni, dans les meubles à volets, n®® 73 et Tòhis, ainsi que dans les trois cadres n°® 74 à 76, placés vis-à-vis, un grand nombre de spécimens de dentelles belges, de dimensions assez réduites, pour la plupart, mais dont la réu- — — nion présente un véritable intérêt documentaire. 98 Le meuble à volets, n° 73, est cojisacré tout entier aux dentelles de Bruxelles, tant à l'aiguille qu'aux fuseaux : on y trouvera, d'un côté, les morceaux ayant au moins cinquante ans d'âge, de l'autre, les pièces plus récentes. Signalons, dans le premier cadre de la pre- mière catégorie, un fragment de réseau drochel, tel qu'on le fabriquait en vue du travail d'applica- tion. Ces morceaux se font rares; celui-ci nous a été offert par M""® Kefer-Mali, qui a dessiné égale- ment l'agrandissement de la maille qui se voit à côté. Dans les cadres suivants, se placent des mor- ceaux d'application, tant sur vrai réseau que sur tulle, d'époque relativement ancienne. Le premier cadre de la deuxième rangée montre, au recto et au verso, la suite des opéra- tions que nécessite le travail du point à l'aiguille. Nous croyons répondre à un désir de nos lecteurs en en donnant une brève description. ■73 à. 76. On commence par prendre un calque du dessin original ; puis, on place sous ce calque une ou plusieurs feuilles de papier mince, suivant les besoins du travail et, à l'aide d'une machine spé- cialè, on pique, à travers l'ensemble, tous les — 99 — contours du dessin. Les piqûres, obtenues de la sorte, sont ensuite poncées au bitume, de manière à obtenir des épreuves, sur lesquelles le dessin primitif apparaît entièrement pointillé en brun.' La ponçure, qu'on partage en plusieurs mor- ceaux, quand la pièce est un peu grande, est remise à l'ouvrière qui, à l'aide d'un picot, la traduit en piqûres sur un papier fort, générale- ment noir, parfois bleu. C'est sur ce papier fort que va s'exécuter tout le travail. Le papier piqué est d'abord fauñlé, tout autour, sur deux morceaux d'étoffe, d'égale dimension, placés l'un sur l'autre. Cela fait, l'ouvrière com- menee la « trace du dessin », en appliquant, sur les contours de celui-ci, un gros fil, qu'elle y maintient étroitement au moyen d'un fil très mince, allant et venant par les points de piqûre et traversant non seulement le papier, mais encore les deux petites pièces d'étoffe placées dessous. C'est ce premier bâti de gros fil, reproduisant fidèlement les contours du dessin, qui doit sup- porter le reste de l'ouvrage; c'est sur lui que 73 à 76. l'ouvrière prend ses points d'attache pour exé- cuter ses cordonnets, ses brodes, ses jours, sa gaze, en un mot, tout ce qui doit former comme la chair de cette première ossature. Le travail terminé, il ne reste qu'à le déli- •— — vrer du support, sur lequel il 100 se trouve fixé. A cette fin, l'ouvrière saisit de chaque main l'une des deux petites pièces d'étoife auxquelles tient le papier et, par une série de courtes saccades, les arrache l'une de l'autre, rompant ainsi les minces fils d'attache qui maintenaient les fils de trace contre le papier piqué. L'ouvrage ne tient plus, dès lors, à ce dernier : il tombe dans la main e.t il ne reste plus qu'à le débarrasser des brins rompus du fil d'attache qui y seraient demeurés attachés. L'ingéniosité du procédé réside notamment dans la présence de la deuxième petite pièce d'étoffe qui, s'interposant entre l'autre pièce et le papier piqué, supporte tout l'effort de l'arrachement, empêchant ainsi le papier de se déchirer et l'ou- vrage de se déformer. Les sept papillons, dont se compose cette démonstration, ont été exécutés, à notre demande, par Minne Dansaert, qui a bien voulu nous en faire don. à 76. Le sixième cadre renferme une série de pièces détachées, exécutées à l'aiguille et destinées à être appliquées sur fond « gaze », ou sur tulle. On j remarquera notamment un oiseau, entouré — de branchages, délicatement travaillé. Cet objet — 101 nous a été donné par Madame Préherbu, de Malines, dont le nom se retrouve fréquemment à côté de morceaux intéressants, donnés ou prêtés par elle. Les autres cadres renferment encore de bons spécimens offerts, en grande partie, par les personnes désignées sous chacun d'eux ,et que nous tenons à remercier de leur bienveillant con- cours. Le meuble à volets, n° 73^'% montre successi- veinent des coupons de dentelles de Flandre, de Valenciennes, de Binche, de Malines, de Marche, de Couvin, de Beaumont, etc. Ces spécimens sont accompagnés, de temps en temps, d'agrandisse- ments et de dessins, à grande échelle, des divers genres de réseau qui y interviennent. Les dessins en question ont été exécutés par M™® Kefer-Mali. Nous en avons reproduit quelques-uns dans les planches qui accompagnent le présent Guide. 73 à 76. On remarquera, dans le cadre n° 76, une pièce curieuse, faisant partie du fonds Montefiore : un éventail, entièrement en cheveux, exécuté aux fuseaux, par les soins de M. Coryn^ de Bruxelles. Nous nous permettons d'attirer sur notre col- lection documentaire, — en formation, l'attention 102 — des Dames qui pourraient nous aider à la com- pléter. De simples fragments de dentelles, sou- vent perdus dans les tiroirs, sans profit pour personne, peuvent devenir des documents utiles, en venant prendre rang dans des séries de l'es- pèce. Un grand nombre de personnes l'ont déjà compris, ainsi qu'on en jugera par les noms inscrits en regard des spécimens exposés. Nous les remercions sincèrement et nous formons des voeux pour que leur exemple trouve beaucoup d'imitateurs. Ill Le troisième compartiment de la section est consacré aux dentelles étrangères : à gauche, l'Italie; à droite, la France et les pays divers. La plupart des subdivisions de ce compartiment ne constituent, nous l'avouons, que de simples rappels de ce qu'elles devraient être en réalité. Elles montreront, du moins, notre intention de nous procurer successivement des spécimens de tous les centres dentelliers étrangers, de quelque importance, et engageront peut-être les producteurs de dentelles à nous accorder leur bienveillant concours dans ce but. L'importance de l'Italie, au point de vue de la dentelle, nous a naturellement amené à lui donner le premier rang dans cette réunion internationale. Les spécimens que nous possédons permettent de suivre sommairement le développement de la den- telle, dans ce pays, depuis le XVI® siècle, jusqu'à la fin du XVIIP. Ils proviennent, en grande partie, du fonds Montefiore. 77. Les dentelles exposées dans le cadre 77, sont vraisemblablement de la deuxième moitié du XVP siècle, époque à laquelle dominait le profil en forme de dents, d'où la dentelle tira son nom et que les Italiens, de leur côté, ont rendu par le — — mot « merletti «, qui signifie créneaux. Les unes 104 sont du point à l'aiguille, les autres, du travail aux fuseaux. 78. Le remarquable tablier, qui occupe ce cadre, est encore de la deuxième moitié du XVL siècle. Il importe de noter qu'il reproduit exactement, comme foruie et comme style, les tabliers que nous rencontrons danscertains tableaux flamands, ceux de Maitin Devos, par exemple. Les entre-deux et la bordure sont travaillés aux fuseaux, mais avec quelques détails exécutés à l'aiguille : tels, par exemple, les croix occu- pant le milieu des dentelures qui constituent la bordure du bas. (Collection Montefiore.) 79. Le cadre suivant présente les dentelles qui se portaient au commencement du XVIP siècle, alors que la mode des grands cols retombants commençait à s'affirmer. 80. On trouve, sous le n"^ 80, les dentelles de l'époque Louis XIII ; dans le bas, le point à 80. l'aiguille ; dans les rangées supérieures, les den- telles aux fuseaux. [Collection Montefiore.) 81- Au milieu du XVIP siècle, les motifs à grandes fleurs remplacent les dessins d'aspect géomé- trique, qui n'avaient cessé de régner jusqu'alors. — 105 — D'opulents rinceaux font de la dentelle de cette époque un ornement vraiment majestueux, cadrant bien avec les goûts et les manières du temps. La manifestation la plus élevée de ce genre est représentée par le point à l'aiguille, dit « gros point de Venise qui occupe le cadre n° 81. 82. Le même style, à larges rinceaux, se retrouve dans cet autre genre de point à l'aiguille, dit « Venise plat », dont on voit, dans le cadre sui- vant, un très bon spécimen. Ce dernier, qui fit peut-être autrefois partie d'un tablier, sert main- tenant de cadre à un fragment de linon, décoré de tulle brodé, moderne, sans doute un voile liturgique. [Collection Montefiore.) 83, C'est une disposition toute pareille que pré- sente, dans le cadre n'' 83, le riche tablier, com- plet cette fois, dont la partie centrale est formée de linon, brodé de fleurs et d'oiseaux, au plumetis et à fils tirés. Le point de Venise, à relief et à 5. — lOG — 83 fond de brides, qui encadre cette broderie, est d'une très bonne facture et d'un dessin fort élé- gant. Nous le datons du commencement du XVIIl® siècle ou des dernières années du XVIP. Cet important morceau appartient à M""® Paul Errera. 84. Avec le XVIII® siècle, apparaissent des motifs plus menus. La solennité du style Louis XIV va faire place à la frivolité, très élégante d'ailleurs, de l'époque de Louis XV. Cette disposition des esprits se reflète dans la dentelle, comme ailleurs. Les spécimens de point à l'aiguille, réunis dans le cadre n° 84, permettront d'en juger. L'un d'eux porte la date de 1703, travaillée dans une grosse fleur, vers le milieu de la pièce. 85. Le cadre n° 85 ne renferme, non plus, que du point à l'aiguille. Nous attirons principalement l'attention sur les spécimens de point à la rose ou rosaline. Il est impossible de pousser la virtue- sité plus loin que dans certaines de ces pièces^ dont les rinceaux disparaissent sous le fouillis de rosaces et de picots, dont ils sont surchargés. Parfois, c'est un excès véritable; mais, parfois aussi, cette richesse se combine parfaitement avec les lignes générales du dessin, bien équilibrées et 85. d'une délicate harmonie. Tel est le fragment de volant, de 0 m 30 de hauteur, qui se voit vers la droite du cadre et dont le coupon, soit dit par parenthèse, a été payé sur le pied de 6000 francs le mètre. — — Nous nous le sommes procuré par les soins de 107 M. Vittore Abolaffio, de Venise, qui nous avait déjà fait don du très joli morceau, du même genre, placé à gauche du précédent. 86. Ce cadre nous présente, au point de vue de la composition, des rinceaux assez semblables à ceux des cadres précédents, mais traduits, cette fois, en dentelle aux fuseaux. Certains de ces morceaux sont, à la fois, d'un beau dessin et d'une bonne exécution. Tels le n° 2S2, placé vers le bas, et le morceau qui le surmonte. La dentelle, dite vermicelli, semée de gros points de neige, nous a été offerte par M*"® De Meuse. Les dentelles, rencontrées jusqu'ici, n'étaient gg que des dentelles à fond de brides. La fin du XVIT siècle et le commencement du XVIIP virent apparaître, en Italie, comme chez nous, les dentelles à fond de réseau. Ce sont princi- paiement ces dernières qui ont occupé ce pays au XVIIT siècle. On peut voir, dans les cadres 87 87 à 89. à 89, ce qu'ont produit, sous ce rapport, Gênes et principalement Milan, sans oublier Venise, où le point à l'aiguille n'empêcha pas de faire aussi quelque peu de dentelle aux fuseaux. On remarquera, dans le grand cadre (n° 88), le — 408 — superbe volant, à sujets de chasse, d'une si belle technique, ainsi que le fragment de très haut volant, aux fleurs élégantes, placé tout à côté. Ces deux morceaux nous ont été prêtés par Mme Paul Errera. D'autres pièces, celles notamment qui occu- pent le cadre n'^ 89, sont d'une excellente exé- cution. 90. Nous en dirons autant d'un certain nombre de spécimens, exposés dans le meuble à volets, au centre du compartiment italien et comprenant du point à l'aiguille, aussi bien que de la dentelle aux fuseaux. Au XVIIP siècle, le point à l'aiguille se pra- tique encore à Venise, où il donne naissance à des produits, assez minces et menus, mais non sans charme cependant. Mais le vrai centre de production s'est légère- ment déplacé ; il a quitté Venise pour Burano, situé d'ailleurs dans son voisinage immédiat. 90. Dernier asile du célèbre point de la cité des doges, Burano produisit alors des dentelles, d'un aspect assez plat et monotone, mais d'un bon dessin et d'une exécution encore fort convenable. Par un singulier retour de ce qui s'était passé en France, en 1665, Burano voulut, à son tour, — 409 — imiter le point d'Alençon, sans toutefois y réussir complètement. Les spécimens réunis ici peuvent en donner une idée, mais bien pauvre, hélas ! La fabrication, complètement perdue à Burano à la suite des événements de la fin du XVIIP siècle, s'y est relevée par le zèle de quel- ques dames de l'aristocratie^ qu'encourageait le patronage de la reine Marguerite. L'école de Burano forme actuellement un établissement prospère, dont nous espérons bien pouvoir, quel- que jour, montrer une série de travaux. De toutes parts, d'ailleurs, on essaie de rendre à l'Italie la profitable activité qu'y développa jadis l'industrie de la dentelle. En 1893, la Comtesse de Brazza exposa, à Chicago, un ensemble, fort admiré, de spé- cimens anciens, réunis de toutes les parties de l'Italie. Cette démonstration, appuyée d'un exposé fort bien fait, exerça la meilleure infiuence sur la reprise de la dentelle dans le pays, où le senti- 90. ment des merveilles exécutées dans le passé donna l'espoir d'en engendrer de nouvelles dans l'avenir. C'est une pensée du même genre,nous l'avouons, qui nous a poussé à réunir, en un ensemble digne — de — notre pays, des spécimens de ce 410 que ce der- nier avait produit jadis de plus beau dans tous les genres de dentelle. Puissent nos efforts être, à leur tour, de quelque utilité, en montrant ce que nos ouvrières surent faire autrefois, et ce qu'elles sauront réaliser encore, si l'on arrive à seconder, par des mesures pratiques, un savoir faire qui ne s'est guère démenti. De Burano, la reprise du point à l'aiguille a gagné d'autres endroits de l'Italie et, tout d'abord, la ville même de Venise, où des écoles furent fondées, l'une par M. Jesurum, l'autre, plus récemment, par M. Vittore Abolaffio. L'un de nos cadres renferme une vue de cette dernière école, ainsi qu'une série de petits travaux en cours, qu'à notre demande, M. Abolaffio a très obligeam- ment fait exécuter par ses ouvrières, de manière à nous donner un échantillon de leur habile façon de travailler. Le point à l'aiguille a, d'autre part, été remis en honneur à Bologne, où le Comité, fondé sous — Ill — 90. le nomd'.^milia Ars, a réalisé, dans ce genre, des travaux parfaits d'exécution, révélant, en même temps, un sentiment d'art des plus élevés. N'oublions pas, enfin, de mentionner 1'» unci- netto un genre de point à l'aiguille qui s'exé- cute dans la Valle Vogna, sur les pentes du Mont Rose. C'était, d'abord, une dentelle pay- sanne, que les femmes du pays ne fabriquaient guère que pour leur consommation personnelle. Une dame irlandaise, Mrs. Lyncb, a pris sur elle d'en faire sortir une industrie susceptible de fournir quelques ressources à la popula- tion, si pauvre, de l'endroit. C'est de sa géné- reuse obligeance que nous tenons les spécimens exposés ici et dont quelques-uns sont naïvement accompagnés du prix courant auquel ils se débitent. La dentelle aux fuseaux s'exécute encore de divers côtés, en Italie. La ville de Gênes l'a complètement délaissée. Mais on la retrouve aux environs, le long de la Riviera, spécialement entre Gênes et Cbiavari, dans ces endroits char- mants qui ont nom Santa Margberita, Porto Fino, et Rapallo. Nous possédons divers mor- ceaux venant de ces endroits, notamment un col de Santa Margberita, don de M'"® Ch. Vander 90. Stappen et un autre, de Porto Fino, don de Ema Bevers. Cantù, au lac de Corne, est également un centre pour la dentelle aux fuseaux. Les spéci- — — mens, que nous en possédons, nous ont été gra- 112 cieusement offerts, à Fintervention de M. Abo- laffio, par la firme bien connue « Manifatture riunite merletti, Cantù ». Ces dentelles, d'une facture consciencieuse, conviennent surtout pour l'ameublement. L'envoi des Manifatture riunite » comprend aussi un peu d'aiguille, soigneusement exécutée. Autour de Venise, Chioggia et Pellestrina fabriquent aussi de la dentelle d'ameublement; ce sont des produits de peu de valeur, ceux, du moins, que nous possédons. Les Abruzzes et la Calabre produisent princi- paiement de la dentelle paysanne, à dessins géométriques, relevant encore, en grande partie, des anciens modèles de point coupé. On pourra se faire une idée de ce travail par la belle chemise de paysanne, exposée dans la vitrine du point coupé (n° 10) ; cette pièce intéressante, avons- nous dit, nous a été gracieusement offerte par 90. M™® Ch. Van der Stappen, qui se l'est procurée dans le pays. Nous n^hésitons pas à ranger, finalement, à la suite des centres dentelliers de l'Italie, la Dal- — — matie, où Zara, la capitale, et Raguse la « Venise 113 slave », luttèrent autrefois avec la grande Venise elle-même, sur le terrain de la dentelle. M""® Natalie Bruck Auffenberg,de Vienne,s'est donné la coura- geuse tâche de relever ce point de Raguse, que son ancienne gloire n^avait pas empêché de se perdre complètement. Nous tâchons, en ce moment même, de réunir une bonne série de spécimens de ces dentelles, tant à l'aiguille qu'aux fuseaux. Mgr Bulic, con- servateur du Musée de Spalato, nous assiste en cela de toute son obligeance ; nous lui en expri- mons nos vifs remercîments. Bien que le macramé, ou dentelle à noeuds, ne soit pas, à proprement parler, de la dentelle, nous ne pouvons passer sous silence cette fabri- cation, jadis très en faveur, principalement dans la région de Gènes. Le macramé ne se fabrique plus industrielle- ment que dans un seul centre, Chiavari, à l'est de Gênes, où l'on en décore des tavayoles ou 90. serviettes. Nous en possédons divers spécimens. Pour le surplus, la confection du macramé est le fait de quelques amateurs, qui, dégagés de toute pensée de lucre, peuvent concentrer d'autant mieux leurs efforts sur les côtés artis- — — tiques du travail. M. Bollati, de Rome, 114 est passé maître en ce genre. On en jugera par les spécimens que leur auteur nous a très obligeam- ment offerts. Ils montrent à quel point ce dernier est parvenu à plier la monotonie de procédés de cette technique, plutôt primitive, à des concep- tions de dessin tout à fait neuves et d'un goût vraiment raffiné. M. Bollati a bien voulu se prêter, en outre, à nous former une série de petits échantillons en cours d'exécution, montrant la façon dont le travail s'amorce et suit son cours. France. La France tient la première place dans la dentelle, après l'Italie et les Pays-Bas. L'industrie de la dentelle y est fort ancienne. Les fameux colporteurs de l'Auvergne, merciers infatigables, vrais traits d'union entre le Sud et le Nord, ne purent manquer de rapporter au pays la recette de ces dentelles qu'ils chargeaient dans leurs balles, aux deux bouts de leur course et dont la fabrication devait leur être d'un si bon appoint, l'hiver. — — Des témoignages précis nous montrent les den- 115 telles en pleine production dans tout le Velay, sinon depuis le XVP siècle, du moins durant la première moitié du XVIP. On n'y fabriqua guère d'articles fins ; mais le pays produisit des quan- tités considérables de dentelles communes, qui s'exportaient partout, et notamment en Espagne, pour la consommation des pays d'outre-mer. 91 La dentelle du Puy demeure actuellement encore le type de ce genre de produits. M. Louis Oudin, fabricant au Puy et vice-président de l'importante Association « la Dentelle au foyer *, nous a gracieusement offert une importante série d'échantillons, montrant la suite des types de fabrication qui se sont succédés dans le Velay, depuis la première moitié du XIX® siècle jusqu'à nos jours. Les dentelles d'ameublement, ainsi que les dentelles noires, y tiennent une assez grande place. Quant aux dentelles d'usage, elles sont principalement représentées par le genre torchon. 11 est à remarquer que les types du Puy — U6 — 91. servent de modèles dans les centres nouvellement créés, tels que la Chine, Madagascar, etc. M. Oudin a reconnu plusieurs modèles de sa fabrication parmi les dentelles qui nous viennent de Chine. Nous adressons nos vifs remercîments à M. Louis Oudin pour le don de cette intéressante série de spécimens, en même temps que pour les indications précises et instructives dont il a pris soin de les accompagner. La fabrication des beaux produits français date de l'année 1665. A ce moment, Colbert, voulant définitivement affranchir la France du tribut qu'elle payait à l'Italie et aux Pays-Bas, du chef des dentelles nécessaires à sa consommation, fonda la Compagnie des Points de France, chargée de développer , dans les centres les mieux désignés à cette fin, la fabrication, soit du point à l'aiguille, soit des dentelles aux fuseaux. La compagnie ne dura que dix ans; mais l'élan était donné et la fabrication française se maintint en bonne acti- vité jusqu'à la fin du XVIIP siècle. La France produisit principalement du point à l'aiguille. 92 à 95. La célébrité d'Alençon et d'Argentan dépassa celle de Bruxelles et rivalisa, peut-on dire, avec 92 à 95. la gloire de Venise même. On trouvera, dans les cadres 92 à 95, des spécimens de la production de ces deux centres dentelliers. Le point d'Alençon est ferme et nerveux; ses reliefs, nettement accusés, devaient, en partie, — 117 — disait-on, cette particularité aux crins que l'ou- vrière glissait souvent à l'intérieur de son point. L'Argentan se reconnait à sa maille plus large, ainsi qu'au décor d'étoiles qui s'y trouve souvent répandu et que l'on a désigné parfois sous le nom d'Argentella. Nous signalerons, dans le cadre 95, un fond de bonnet, en Argentan, du travail le plus minutieux et le plus raffiné. Il fait partie du fonds Monte- fiore. La dentelle aux fuseaux n'a guère été pratiquée en France, en dehors du Velay, qu'en Normandie et dans les provinces du Nord. La Valenciennes y éclipse toutes ses sœurs. Nous nous permettons de renvoyer le lecteur à ce que nous en avons dit, à l'occasion des dentelles de Belgique. Qu'il nous suffise d'ajouter que la fabrication a complètement cessé dans la région de Valenciennes. 96 à 98, Arras et Lille se trouvent, un peu, dans le même cas que Valenciennes-. Ces villes ont fait également partie des Pays-Bas ; leur industrie s'est transportée en partie chez nous; les pro- vinces d'Anvers et de Limbourg font du point de — 118 — Lille et nous avons dit précédemment que la maison Van Migem, notamment, continuait à en produire couramment dans le pays de Waes. Néanmoins, la confusion entre les produits fran- çais et belges n'a pas été aussi complète que pour les Valenciennes. C'est ce qui nous a engagé à classer Lille et Arras parmi les centres français, quitte à présenter parmi nos documents de Bel- gique, les spécimens de ces mêmes dentelles qui pourraient se réclamer de notre pays. 99 et 99bis L0g Vosges fabriquent également de la dentelle aux fuseaux ; Mirecourt et Vitrei en produisaient dès le XVIP siècle. La fabrication du siècle suivant rappelle principalement celle de Lille et d'Arras. Là, comme dans beaucoup d'autres endroits, l'industrie faillit se perdre à la suite de la Révolution. Elle se ranima vers 1830 et, en 1851, la fabrique de Mirecourr-Vittel comptait 25,000 ouvrières. Malheureusement, la concur- rence de l'article commun, que les Vosges ne pouvaient se décider à produire, fit fiéchir, de 99 et 99Ws nouveau, pour un temps, cette prospérité. Ce furent les demandes pour l'ameublement qui déterminèrent la reprise, dont nous sommes témoins actuellement. Mirecourt et Vittel n'ont cessé d'apporter à la fabrication des nouveaux — 149 — genres les qualités de soin et de précision qui les avaient toujours distinguées. M. Edmond Deltenre, de Paris, a bien voulu nous offrir une série de spécimens de sa fabrique de Vittel, si habilement dirigée par M. H. Flo- rentin. Ces guipures, exécutées en beau fil, sur carreaux tournants, témoignent bien des qua- lités les que nous relevions, à l'instant, dans dentelles des Vosges, en général. Leurs dessins ne sont pas seulement élégants et d'un bel effet décoratif : ils donnent, en outre, l'impression de leur parfaite appropriation à la technique dentel- lière, qualité capitale obtenue dans le cas présent, nous le savons, grâce à deux conditions qu'il importe de retenir : les connaissances techni- ques du dessinateur, qui, ses dessins terminés, s'occupe lui-même de leur piquage; et, d'autre et part, l'absence d'intermédiaires entre l'ouvrière la direction, circonstance qui joint aux avantages économiques que l'on sait, celui des rapports directs et constants entre l'auteur des dessins et les ouvrières chargées de les exécuter. — 1-20 — 100, Le reste de nos dentelles étrangères se trouve exposé dans le meuble à volets n° 100. Certains pays, tels que l'ancien Danemark et la Suède, y sont assez convenablement représentés. Pour d'autres, nous l'avons dit, notre collection est encore en voie de formation. Danemark. L'ancienne province danoise de Slesvig-Hol- stein a tenu jadis une place assez en vue dans l'industrie qui nous occupe. La petite ville de Tondern était, dès le XVIP siècle, célèbre par ses dentelles, dont la technique y avait été importée des Pays-Bas. Le roi Christiern IV favo- risa l'industrie ; il s'occupait lui-même d'acheter les dentelles nécessaires à sa consommation person- nelle. On conserve, au musée royal de Rosenborg, un col en dentelle qui fut porté par ce roi. M™® Sara Rasmussen, de Copenhague, a obtenu l'autorisation d'en prendre un piquage, qu'elle nous a gracieusement offert. Il se trouve placé à côté de la dentelle que nous avons fait exécuter, sur ce document, par les soins obligeants de Minne Dansaert. C'est aux démarches de M*"® Rasmussen que — 121 — 00. nous devons également la plupart de nos den- telles de Tondern. Cette amie dévouée de notre collection les a sollicitées, à notre intention, des dames de Copenhague, qui n'ont pas hésité à les lui remettre pour nous. Nous adressons ici tous nos remercîments à M""® Rasmussen et à nos gracieuses donatrices. Suède. La dentelle suédoise se répartit entre trois centres principaux ; la Scanie, tout au sud, Wadstena, au bord du lac Vetter et, un peu plus au nord, la Dalécarlie. Les dentelles de Scanie, d'un dessin serré, rappellent assez bien les anciens galons, dits pas- sements. Celles de Wadstena ont plus de grâce et de dessin, circonstance due, sans doute, à ce que leur premier centre fut un couvent de femmes, où s'exécutaient, en général, de beaux produits. La Dalécarlie nous ramène aux dentelles pay- sannes, plus rustiques, sans doute, mais origi- nales et atteignant parfois une réelle élégance. On ne pourra manquer de compléter ce léger aperçu de la dentelle suédoise en allant voir, sur (3 - 100. le palier d'entrée, une collection de dix coiffures, caractéristiques des diversesprovinces de la Suède, que M. et Peltzer-De Mot ont eu la bonne pensée de nous offrir en souvenir de leur séjour à Stockholm. Angleterre et Irlande. L'endroit de l'Angleterre, le plus célèbre pour ses dentelles, est la petite ville de Honiton, dans le Devonshire. Les spécimens que nous en possé- dons sont de mince valeur. Nous comptons bien nous en procurer d'autres, en même temps que des produits d'autres centres encore, notamment du Buckinghamshire, du Bedfordshire, etc. Nous avons également à organiser l'exposi- tion des dentelles qui se font en Irlande et que représentent seulement ici les jolis spécimens de point à l'aiguille, travaillés dans le couvent de Kenmare. Ils nous furent donnés par Mrs. Lynch, dont nous avons eu déjà l'occasion de citer le nom, au sujet de « l'uncinetto » de la ValleVogna. Suisse. La Suisse ne compte guère parmi les pays dentelliers. On y a fait cependant de la dentelle 100. autrefois et, de divers côtés, l'on s'eiforce aujour- d'hui de rendre quelque vie à cette industrie. Nous n'avons réuni jusqu'à présent que quelques spécimens, du genre torchon, offerts par M*"® Kefer-Mali. — 425 — Pays Slaves. Il y aurait à faire une place assez importante aux dentelles slaves, qui, chez les peuples de l'est de l'Europe, interviennent d'une façon nota- ble dans la toilette féminine et qui revêtent, du reste, une grande originalité. Les spécimens exposés ici, sans être des meilleurs, peuvent néanmoins donner déjà une idée (de ce genre très spécial. Grèce. La Grèce s'occupe, de son côté, d'introduire la dentelle dans le travail des femmes. Une école dentellière a été fondée à Athènes, sous le patro- nage de S. M. la Reine. On y fait des travaux d'aiguille, à l'imitation de Venise, et des dentelles aux fuseaux, dans lesquelles se retrouvent, à côté des simples torchons, des produits inspirés de nos dentelles belges, delà Duchesse notamment. 100. Les spécimens exposés ici nous ont été donnés par M. Sainctelette, à l'époque où il était ministre de Belgique, à Athènes. Chypre. — 124 — Nous devons les quelques morceaux, exposés sous ce nom, à l'amabilité de M. Louis Rosseels, consul général de Belgique, à Athènes. Ils ne constituent pas, à vrai dire, de la dentelle, mais seulement du point coupé. On retrouve dans ces dessins, restés géométriques, l'ancienne technique de Venise, demeurée comme un souvenir de la domination que la cité des doges exerçait autrefois dans toute cette partie de l'Archipel. Smyrne. Le travail à l'aiguille, caractéristique de Smyrne, se compose de fleurs et d'ornements d'une grande finesse, formant des petites guir- landes et des bouquets, et servant à orner des objets de toilette ou de fantaisie. On lui donne le nom d'oyah. Nous pouvons en montrer un assez joli spécimen ; une petite bourse, bordée d'une délicate guirlande polychrome, prêtée par M'"' Eugène Cumont. — m — Chine. 100. Nous avons reçu du Gouvernement chinois une importante série d'échantillons des dentelles exé- cutées dans diverses écoles dentellières, dirigées par des religieuses. Oe sont exclusivement des dentelles «torchon», dont les dessins ont été pris un peu partout. Nous avons dit plus haut que M. Oudin, grand fabricant au Puy, y a reconnu divers motifs empruntés à ses propres modèles. La régularité et la précision de leur exécution font de ces dentelles des produits intéressants. Brésil. Ce sont également des dentelles « torchon » qu'on fabrique au Brésil. Mais il est à remarquer que les modèles, sans être bien jolis, sont, du moins, beaucoup plus originaux que ceux d'autres pays lointains. Les spécimens, que nous exposons, nous ont été donnés par le Ministère des affaires étrangères. Mexique. 100. Le joli col qu'on voit ici, décoré d'un aigle mexicain, qui suffirait à lever tout doute sur l'ori- — 126 — gine de l'objet, nous a été gracieusement offert par M®"® Huart, de Jambes-lez-Namur. La fabri- cation se rapproche tout à fait du genre dit Téné- riffe, que ce spécimen représente chez nous, en attendant que nous puissions nous en procurer des produits plus directs. Liste des donateurs M. Vittore Abolapfio , à Venise. Ottilia Adelborg , à Gagnef (Suède). M'"® Annemans van Volxem , à Bruxelles. M^^® Thérèse Anrich , à Copenhague. M. et M™® Beernaert , à Bruxelles. M. Otto Berghaus , à Bruxelles. M""® la Chambellane de Beuzon , à Copenhague. IVT^® Emma Bevers , à Ascot, Berks (Angleterre). M. et M""® Bollati , à Rome. M™® Bonmariage , à Bruxelles. M^^® Adèle Boucher , à Bruxelles. M""® la C®®®® Brogkenhuis Schack , à Copenhague. M"*® la Générale de Bulow , à Copenhagne. M"® Z. Bureau , à Bruxelles. M. Félix Capitaine , à Liège. M. Antoine Carlier , à Bruxelles. M. Iiouis Cavens , à Bruxelles. M""® la Chambellane Cederfelt , à Copenhague. M™® Edmond Christiaens , à Bruxelles. M""® Hector Colard , à Bruxelles. M""® Croôy , à Bruxelles. M'"® Adolphe Cumont , à Bruxelles. M"*® Eugène Cumont , à Bruxelles. M^^® Clara De Craene , à Bruxelles. M. De Deyn, à Ninove, M™® Delehaye , à Bruxelles. M. Delmoitié , à Bruxelles. - — M. Edmond Deltenre , à Paris. 128 M. Pierre Demangeleer , à Bruxelles. M'"® De Meuse , à Bruxelles. M""® Paul De Mot , à Bruxelles. M. Eugène Devaux , à Bruxelles. M. Georges Devemy , à Valenciennes. M™® Charles Dubois , à Bruxelles. M"® Du Fief , à Bruxelles. M™® Max du Pon , à Bruxelles. M*"® Paul Errera , à Bruxelles. M*"® la G®®®® Frys , à Copenhague. M"® Gasparoli , à Bruxelles. M. et M'"® Gerard , à Cou vin. M™® Goldschmidt Przibram , à Bruxelles. M™® H. Gossey , à Bruxelles. Le Gouvernement Chinois. M™® Charles Grognier , à Bruxelles. M. Léon Grosjean , à Bruxelles. M'"® Hayez , à Bruxelles. M^^® Julie Hayez , à Bruxelles. M^^® Huart , à Jambes (Namur). M""® Jaffé Gluge , à Bruxelles. — 1^9 — Johnston , à Paris. M""® de JuRiÉ, à Vienne. M™® Kefer Mali , à Bruxelles. M"® E. Lecointe , à Bruxelles. M'"® Lefebvre Giron , à Bruxelles, M"® Marie Legendre , à Bruges. M""® Gabrielle Lies , à Bruxelles. Mrs. Lynch , à San Remo. M""® Georges Macoir , à Bruxelles. M. et M"^® Mailiheux , à Couvin. M™® Eugène Marlier , à Bruxelles. Manifatture riunite merletti, Cantù. Qte Qsse Marnix de S'® Aldegonde, à Bruxelles. M™® Henri Martin , à Bruxelles. M. Emile Masuy , à Couvin. M""® Mathys , à Bruxelles. M""® Henri Mayer , à Anvers. mlle Minet à Bruxelles. , Le Ministère des Affaires Étrangères, à Brux. M"® Minne Dansaert à Haeltert. , M. et M®® Georges Moens , à Bruxelles. M™® Monseur à Bruxelles. , M™® Nachtergal Gravez , à Beaumont. m"® Virginie Nathan , à Rome. M™® Naus , à Bruxelles. M. Louis OuDiN, au Fuy. Mme Oswald , à Bruxelles. M. M. Oswald et O®, à Bruxelles. M""® Peltzer de Clermont , à Verviers. M. et M™® Peltzer De Mot , à Berlin. M'"® Préherbu , à Malines. — — M™® Edgar de Prelle de la Nieppe , à Brux. 150 M*"® Adolphe Puissant , à Bruxelles. Frôken Quaade , à Copenhague. M™® la C®®® de Rantzau , à Copenhague. M™® Sara Rasmussen , à Copenhague. M"® Riocée , à Bourlers. M. Robyn Stocquart , à Bruxelles. M®® Rosenthal , à Bruxelles. M. Louis Rosseels , consul général de Belgique, à Athènes. M'"® R. Ruelens , à Bruxelles. Mil® j^ypens , à Bruxelles. M. Sainotelette , à Bruxelles. M*"® Schellekens De Pauw , à Lierre. M"® Carmen Siebolt , à Hanovre. M. Raymond Simeons , à Bruxelles. Société les Arts de la Femme, à Bruxelles. Société des Amis des Musées Royaux de l'Etat, à Bruxelles. M™® SoHiE, à Bruxelles. M"® Hilda Starck , à Stockholm. M. Herman Stern , à Bruxelles. M®® Stevens Geerlandt , à Bruxelles. mme Uihlein , à Bruxelles. M*"® l'amirale Uldall, à Copenhague. M™® Ulens , à Bruxelles. Les Dames Ursulines , à Ambert, près Genappe. — — M. le B°" Maurice 131 van der Bruguen , à Wiels- beke. M'"® Charles van der Stappen , à Bruxelles. M. van der Straeten , à Bruxelles. M*"® Emile Vandervelde , à Bruxelles. M""® Blanche van Donghen , à Bruxelles. M""® Benoit van Eeghem , à Bruges. mlle phiiomène van Hammée , à Malines. M. Auguste van Landschoot , à Bruxelles. M. Emile van Migem , à Anvers. M. Eugène van Overloop , à Bruxelles. M. l'abbé Verbesselt , curé des S.S. Jean et Etienne aux Minimes^ à Bruxelles. M""® Ernest Verlant , à Tervueren. M""® DE Vigneron, à Bruxelles. Mme Qjjier Vilain, à Bruxelles. Mm® Polydore Vits , à Deurle. M. Raoul Warooqué , à Bruxelles. M^i® Wedel-Heinen , à Copenhague. M"® wimpfen, à Copenhague. M. le B®"" Léopold de Woelmont , à Bruxelles. M. Wouters-Dustin , à Bruxelles, Liste des déposants M"*® Annbmans van Volxbm , à Bruxelles. M'"® Adèle Bayard , à Bourlers. M. l'abbé Boonb , curé de Sainte-Gertrude, à Etterbeek. La Confrérie de N. D. de Miséricorde à l'église de N. I). de la Chapelle, à Bruxelles. M*"® Crooy , à Bruxelles. M™® Paul Errera , à Bruxelles. La Fabrique de l'église de Saint-Nicolas, à Bruxelles. Hélène Godtschalck , à Bruxelles. M™® Emile Goossbns , à Middelkerke. M*"® Émile Grafpb , à Bruxelles. M. Georges Mobns , à Bruxelles. Préhbrbu , à Malines. M. Robyn-Stocquart , à Bruxelles. uuujLiJejui^'" IT s s ^ 32 3 3 35 m i-.\ I L ¿L f j (y Fíame. fJ ■^looN piveis) p DEiittite ÉtiangETts I ta f {e. F T d a L E- 79 7S 77 33"'· 31 . 39 ., _ 5 2 S3 5Jt 5 5 56 Deiittllfs |6< 61 1 6>o 59 Biuxeljes F Í aadie 't'f V'i